2024 sera à nouveau marquée par les progrès et l’adoption de l’intelligence artificielle générative, cela ne fait aucun doute. J’ai voulu dans cette tendance pousser un cran plus loin si je puis dire, et pour m’aider, j’ai lu le livre passionnant des experts de Gartner : « When machines become customers » ou il est question de ce client robot dont je parle dans mon exercice de tendances. Le client robot, robot-client ou « custobot » sont des « systèmes capables de négocier et d’acheter de manière autonome des biens et des services en échange d’un paiement. Ces robots-clients génèreront des milliards de dollars de revenus d’ici à 2030. Leur impact sera plus important que l’avènement du e-commerce. » (je cite l’article du Monde Informatique qui se fait l’écho des tendances IT de Gartner).

L’avènement du Custobot.

Les conditions sont aujourd’hui réunies pour le développement du client robot selon Gartner : l’intelligence artificielle générative est opérante, le cloud est prêt à accueillir ses données, l’IOT (Internet of Things) a passé la phase de lancement, la Blockchain est opérationnelle et enfin, la DAO ou l’automatisation du chiffre d’affaires (organisation autonome + contrats intelligents + outils + protocoles + transactions + contrat)  est en bonne voie. Dans 4 ans selon Gartner, 15 milliards de produits connectés seront capables de se comporter comme des clients.

Pour le moment, nous sommes dans les phases 0 et 1 selon Gartner. L’entreprise de conseil américaine a identifié quatre étapes :

evolution custobot client robot

L’étape 0 se distingue par la collecter et le partage d’informations, dans laquelle l’humain décide et la machine exécute (ils prennent l’exemple du bracelet FitBit ou d’une tondeuse à gazon intelligente). L’étape 1 dite du « client robot lié » voit ses choix clairement définis et des achats dictés par des règles identiques à la phase 0.

A long terme, Gartner imagine un client robot autonome dont les besoins sont déduits, basés sur des règles et un contexte, mais le client robot possède ses propres besoins. Il décide seul, il exécute seul. Ce serait le cas pour des taxis complètement autonomes, ou des distributeurs automatiques qui agiraient en acteurs et centres de profit indépendants.

Cette vision du futur est partagée par la société canadienne TRIAD qui a publié un benchmark (pardon, une étude de balisage comme disent nos amis Québécois qui respectent la langue française) avec l’AMARC en concluant par l’avènement du M2M, le machine à machine.

Préparons-nous à un monde dans lequel certains clients seront des robots, redoutables négociateurs, capables de traiter une très grande quantité de données et surtout totalement insensibles à la qualité de la relation et aux efforts d’enchantement des êtres humains… (un profil développé par Gartner). A moins que des conseillers robots ne leur répondent bien entendu.

Revenons aux usages de l’intelligence artificielle en 2024 dans la relation client et en particulier à l’IA générative, dont ChatGPT est le représentant le plus célèbre (lire son interview sur mon blog, la première d’un robot). J’ai trois bons exemples à partager avec vous, dont un complètement inédit :

  • Le premier me vient de mon expérience personnelle sur Linkedin (774 millions de membres). Désormais, il est possible de faire rédiger un article par une intelligence artificielle. Il vous suffit de donner des informations détaillées sur un sujet et l’IA de Linkedin rédige pour vous.
  • Deuxième exemple : la MACIF, avec l’autorisation de son directeur de l’expérience client Dominique Russo (lire son interview sur mon blog), m’a transmis un document anonymisé assez stupéfiant qui est une réponse à une enquête de satisfaction par un sociétaire. Ce dernier prend soin d’introduire son avis par une phrase contenant son « prompt » (la question posée à une IA générative) : « Un peu la flemme d’expliquer, j’ai demandé à Chat GPT de le faire pour moi : Tu es un client d’une compagnie d’assurances et tu dois laisser un avis sur la conseillère que tu as eu au téléphone avec qui ça s’est très bien passé.« . L’avis est parfait. Attendez-vous dans les années qui viennent à lire une prose de robot !
  • Et le 3ème exemple nous vient d’Inde, où le département gouvernemental de la consommation propose désormais officiellement aux citoyens de faire rédiger des courriers de réclamation par ChatGPT. Avis aux membres de l’Association pour le Management de la Réclamation Client, les clients insatisfaits sont eux aussi augmentés !

Les consommateurs sont enthousiasmés par la perspective d’utiliser l’IA générative pour rédiger, affiner, résumer et modifier le contenu basé sur des prompts : la moyenne sur 13 pays est de 64% de réponses nous dit Capgemini Research Institute, Generative AI consumer survey, d’avril 2023.

BVA Xsight quant à lui, nous révèle que les clients français sont prêts à utiliser l’IA générative pour « obtenir une réponse suite à une problématique » (51%), « écrire un discours, un texte » (36%) ou encore faire rédiger un e-mail à leur place (18%), ce qui s’apparente à la catégorie de notre sociétaire MACIF cité plus haut.

Si l’on s’intéresse comme Salesforce dans son étude Focus sur le Client Connecté, 6ème édition, aux différents types de clients, on apprend que 72% des acheteurs B2B pensent que l’IA générative va aider les entreprises à mieux servir les clients, vs 48% pour les particuliers. On peut donc s’attendre à un usage plus intensif dans le milieu professionnel, avide de gain de productivité.

L’adoption rapide de ChatGPT en quelques mois (en janvier 2023, plus de 667 millions de visiteurs ont été enregistrés sur OpenAl, principalement grâce au succès de ChatGPT) s’explique par le bénéfice immédiat perçu par les clients qui sont désormais 70% à penser que l’IA peut créer des expériences d’assistance plus personnalisées et plus efficaces (source Source : Zendesk 2023).

Pour les clients, selon l’Observatoire des services clients 2023, « analyser rapidement votre demande pour la diriger vers le bon service » (96%), « aider à la prise de décision des conseillers » (93%) et « aider à la qualité des réponses par écrit » (93%) sont les 3 initiatives jugées les plus utiles. Quant aux préoccupations majeures, selon Salesforce, la première est « c’est important de savoir si je communique avec une IA ou un humain » (89%), la deuxième est « Il est important qu’un humain valide les réponses d’une IA » (80%) et la troisième « l’IA générative pourrait introduire des risques de sécurité des données » (75% de taux d’accord).

En somme, si l’on considère toutes ces informations, les balises de la feuille de route sont claires pour les entreprises : une adoption massive de l’IA générative (plus forte en B2B), des bénéfices patents pour le client et pour le collaborateur en contact, des préoccupations centrés sur la confiance dans la relation, comme en écho à ma tendance précédente « le client sera confiant ».

Enjeux pour faire face au client robot :

  • Se préparer à des relations avec des clients augmentés, des intelligences artificielles, des transactions sans relation.
  • Repenser la place de l’humain dans la relation (empathie, connivence, improvisation, humour, prise en compte des émotions…)

Si j’ai fait appel le 7 décembre dernier à un acteur d’improvisation pour faire en direct le match humain vs machine, c’est justement pour aider les personnes présentes à considérer l’apport essentiel de l’humain dans la relation et commencer à réfléchir à un avenir proche, avant de penser au client 100% robot. Comme disait Beaumarchais : « Je me presse de rire de tout, de peur d’être obligé d’en pleurer. »

match humain machine

Mon exercice annuel des tendances a donné lieu à une conférence spéciale avec le soutien de Comearth, KPAM et SmartTribune (qui en connaît un rayon sur l’IA). Dès le 17 janvier 2024, vous aurez accès gratuitement à l’intégralité des diapositives de ma conférence et des billets de mon blog à ce sujet.

1094ème billet signé Thierry Spencer, conférencier, créateur du blog Sens du client, co-fondateur de KPAM Next. Cet article a été écrit sans l’aide de ChatGPT, sauf pour la photo illustrant ce billet qui a été créée entièrement par DallE, une autre filiale de OpenAI.