
- elle a 26 ans
- elle est anglaise
- elle surfe vraisemblablement sur internet plus de 2h17 par jour (moyenne française source GFK vs 3h00 pour la télévision)
- elle fait partie d'un réseau social type Facebook, Twitter, Myspace (comme deux tiers des internautes désormais, source Nielsen online)
- elle passe 10% de son temps de surf sur les réseaux sociaux (désormais plus que pour les emails, source idem)
- elle est cliente de l'enseigne Marks & Spencer
- elle a une forte poitrine (bonnet E)
- elle ne supporte pas de payer 3 euros (2 livres sterling) de supplément pour son soutien-gorge grande taille.
Maintenant que vous connaissez mieux Beckie, vous ne vous étonnerez pas de savoir qu'elle s'est plaint auprès de l'enseigne pour ce supplément de prix en juin 2008.
Marks & Spencer n'a affiché selon elle que mépris et manque d'empathie pour les femmes à la poitrine généreuse pendant une année, jusqu'à ce qu'elle décide d'acheter une action de l'enseigne à 5 euros pour participer à la prochaine Assemblée générale et apostropher Sir Stuart Rose, honorable Président soixantenaire du distributeur anglais. Elle pensait qu'un actionnaire aurait plus de poids qu'un client, mais elle n'aura pas eu l'occasion de s'exprimer dans cette très officielle assemblée car une autre idée s'est révélée plus efficace.
Le fait d'arme majeur de Beckie aura été la création sur facebook d'un groupe intitulé "Busts 4 justice" (un jeu de mot subtil sur le buste) et comptant au moment où j'écris ces lignes 18503 membres, pour défendre la cause des gros seins.
Le buzz médiatique relayé sur tous les grands médias fut tel outre Manche que l'enseigne a fini par céder et, par le biais d'une campagne de communication assez habile (mais tardive) intitulée "we boobed" (un jeu de mots sur les seins et le fait de faire une gaffe), annoncer le prix unique sur les soutien-gorges et 25% de remise exceptionnelle pendant quinze jours.
Que faut-il en retenir ?
Comme je l'expliquais ce matin pendant mon intervention à la 18ème convention de l'Association pour le MAnagement de la Réclamation Client, les entreprises ne sont pas encore prêtes à entrer en conversation avec le client.
C'est ce que je nomme la parabole du surfer d'argent (déjà développée dans un de mes anciens billets) qui qualifie les situations dans lesquelles un simple client peut faire plier une entreprise.
Si le combat de Beckie Williams peut être jugé comme infondé ou injuste, Marks & Spencer a fait preuve d'une royale cécité -pendant un an- s'agissant de l'influence d'internet en général et des réseaux sociaux en particulier.
Je vous rappelle que la France à ce jour compte 9 millions d'inscrits sur Facebook qui s'y retrouvent chaque jour pour 50% d'entre eux (lire mon billet sur les tendances du client 2009).
Je fais le pari que dans un futur proche (en 2012 selon certaines estimations), lorsqu'un milliard de personnes seront sur les réseaux sociaux, la relation client sera sur la place publique.
Ajoutons deux citations issues de la convention de l'AMARC de ce jour pour renforcer mon propos : Léonard Cox, chargé de mission à la Direction des affaires juridiques du MEDEF déclarait "La relation client est un vecteur de progrès pour l'entreprise" et Gaëlle Patetta, Directrice juridique d'UFC- Que choisir, précisait "Les clients se heurtent trop souvent à un refus de dialoguer".
C'est donc aujourd'hui que les entreprises doivent prendrent en compte cet enjeu sous trois dimensions :
1) Si tout est public et transparent, les marques qui feront la différence seront celles dont la promesse et la valeur seront affirmées, prouvées et attestées par les clients en direct.
2) La relation client va devenir une discipline centrale et intégrée au marketing et non pas un département web, une force de vente, un call center ou un service consommateurs.
3) Les entreprises qui sauront dialoguer et gérer les communautés seront gagnantes. La difficulté que les entreprises vont rencontrer sera l’organisation du dialogue. Qui prend la parole ? Qui a le droit de s'exprimer au nom de la marque ? Pour dire quoi ? A qui ? C’est une nouvelle et belle aventure qui ne touchera pas seulement la relation au client, mais ni plus ni moins que le management des entreprises.
Billet écrit par Thierry Spencer - Blog du Sens du client
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