C'est ainsi que, celui qui a été nommé "grand prêtre" de la fidélisation client par The Economist, raconte la genèse du NPS dans son dernier ouvrage sorti il y a quelques mois (et dont je ferai la chronique dans quelques semaines) intitulé "La promesse gagnante". Il pense que "lorsque les clients prennent conscience de cette bienveillance (dont les salariés bénéficient de la part de leur management), ils n'hésitent pas à revenir et à acheter encore et encore, en amenant aussi leurs amis. Ce comportement alimente un cercle vertueux qui favorise la croissance."
Il pense au départ à nommer sa mesure le NLE pour "net lives enriched" (vies nettes enrichies) puis se résout à adopter un nom plus professionnel, en référence au calcul des promoteurs : le NPS ou Net Promoter Score. Pour mémoire, le NPS est obtenu par soustraction entre le pourcentage de promoteurs et le pourcentage de détracteurs. Un promoteur est une personne qui mettra 9 ou 10 en réponse à la question "Sur une échelle de 0 à 10, quelle est la probabilité que vous recommandiez [notre entreprise] à un ami ?" (0 = "pas du tout probable", 10 = "très probable").. Un détracteur est celui qui met une note de 0 à 6 en réponse à cette question. Les personnes qui répondent 7 ou 8 ne sont pas comptées et sont considérées comme passives ou neutres.
Depuis quelques années, je lis avec intérêt quelques points de vue au sujet du NPS, étayés par une étude de Gartner qui annonce que 75% des entreprises envisagent d'abandonner le NPS pour mesurer le succès de leur service client et de leur assistance d’ici 2025. Un joli buz pour une étude faite auprès 42 responsables de service client en mars 2021, mais qui démontre l'appétence légitime des professionnels pour la remise en cause de leurs indicateurs.
Je me lance donc dans l'exercice des avantages et des inconvénients du NPS.
Que reproche-t-on au NPS ?
- Fluctuations. Le NPS est influencé par des facteurs externes tels que l'effet de nouveauté, l'effet de tendance en faveur d'un produit ou d'un service, l'image de marque. Cela peut entraîner des fluctuations dans le score NPS qui ne reflètent pas nécessairement la qualité de l'expérience client. Ainsi, on pourrait expliquer les bons NPS de Tesla, nouvel arrivant sur un marché traditionnel, ceux d'Apple, dont l'image de marque est excellente, ou bien encore Burger King vs McDonald's en France (l'un est tendance avec une communication en rupture, l'autre installé et dominant).
- Caractère limité. La note du NPS est limitée dans sa capacité à fournir des informations détaillées sur les raisons sous-jacentes de la satisfaction ou de l'insatisfaction des clients. Quand les répondants ne sont pas invités à fournir des commentaires supplémentaires (qu'on nomme des verbatims) pour expliquer leur notation, cela limite la capacité de l'entreprise à identifier les problèmes et les opportunités d'amélioration. Bref, la note seule du NPS ne suffit pas.
- Différences culturelles. Les différences culturelles peuvent avoir un impact sur la signification et l'interprétation des scores NPS. Les clients dans certaines cultures peuvent être moins enclins à donner des notes extrêmes, ce qui peut fausser les résultats du NPS et limiter la comparaison. On dit souvent par exemple que les Américains n'ont pas peur de mettre 10 et que les Français sont timides sur la reconnaissance de l'excellence.
- Méthode sommaire. La méthode de calcul du NPS peut être critiquée car elle repose sur une simple soustraction de pourcentages de répondants (les promoteurs moins les détracteurs) plutôt que sur des statistiques plus sophistiquées, telles que la régression ou la corrélation.
Quels sont les avantages du NPS ?
- Simplicité. Principal avantage du NPS : c'est la mesure de l'expérience client pour les nuls. La simplicité de la méthode rend le NPS facile à comprendre et à communiquer. Les résultats peuvent être facilement partagés avec toutes les parties prenantes de l'entreprise, des collaborateurs aux dirigeants jusqu'aux actionnaires.
- Universalité. L'idée de génie de son créateur est de favoriser son adoption en créant en 2003 une mesure "open source", alors que la plupart des sociétés d'études gardent jalousement leurs formules et leurs marques déposées. Vingt ans après sa création, deux tiers du Fortune 1000 (les 1000 plus grandes entreprises américaines) ont adopté la mesure. C'est une mesure universelle. Le bénéfice qui en découle est que le NPS permet aux entreprises de suivre les tendances de leur secteur et de l'ensemble du marché (si vous cherchez une source de benchmark, je vous recommande le site customergauge). L'adoption du NPS a permis d'ouvrir les entreprises à la notion de concurrence d'expérience, dans le sens où elles explorent grâce au NPS des entreprises qui font vivre de très bonnes expériences à leurs clients. De ce fait, le NPS est une très bonne façon de mettre fin à la fatalité des scores au sein d'un secteur (assurance, banque, fournisseurs d'accès à internet, opérateurs de téléphonie, administrations... pour ne citer que certains des plus mauvais). L'objectif d'enchantement est permis, il est à la portée de toutes les entreprises !
- Comparaison. Les entreprises peuvent utiliser le NPS pour comparer leur performance avec celle de leurs concurrents, à condition de suivre scrupuleusement la méthode bien entendu. Les puristes mettront un bémol à cet avantage car on constate des écarts significatifs en fonction du moment ou on pose la question dans l'expérience du client, de la position de la question dans un questionnaire... J'ai connu des entreprises dont le dirigeant voulait "un bon NPS". En optimisant l'administration du questionnaire et en n'interrogeant qu'une partie des clients, on peut fausser les résultats bien sûr. Mais quel est l'intérêt de mentir sur la température d'un patient malade ?
- Amplitude. Le NPS a un avantage singulier : l'amplitude des notes est beaucoup plus importante que celle de n'importe quelle autre étude. Le score va de -100 à +100 et offre ainsi davantage de nuances dans l'analyse. Par ailleurs, il évolue de façon plus importante et sensible qu'un pourcentage de clients satisfaits. En ce sens, il suscitera plus d'intérêt en interne et pourra être plus motivant.
- Déclinaison. Le NPS se décline facilement auprès d'autres populations que celle des clients. Ainsi, on a vu fleurir le NPS pour les collaborateurs, pour les prestataires ou fournisseurs... L'adoption de cette mesure par plusieurs départements de l'entreprise permet un salutaire décloisonnement et la fixation d'objectifs en symétrie.
- Focus. Le NPS peut aider à identifier les promoteurs de l'entreprise, qui sont des clients très satisfaits et fidèles, et peuvent potentiellement devenir des ambassadeurs de la marque en recommandant l'entreprise, le produit ou le service à leur famille, amis et collègues. La beauté du NPS repose sur sa capacité à se concentrer sur ce qu'on pourrait nommer l'enchantement. Une enquête de satisfaction traditionnelle donne généralement un pourcentage global qui agrège satisfaits et très satisfaits. Ainsi, une entreprise peut se réjouir d'un taux de satisfaction de 85%, alors que moins de 10% sont "très satisfaits". C'est le fameux effet pastèque : "vert à l'extérieur, rouge à l'intérieur". C'est la raison pour laquelle EDF par exemple a adopté un score qu'ils nomment la "très satisfaction", afin de se concentrer sur les clients les plus satisfaits. De cette façon, ils se rapprochent de l'esprit du NPS : se concentrer sur ce qui fait vraiment la différence.
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