08 septembre 2018

10 préjugés sur les avis clients en ligne pour démêler le vrai du faux

Norme NF Z 74 501
La publication des avis des clients sur internet est un sujet qui me passionne. C'est un thème qui enflamme les journalistes et les entreprises à chaque nouveau fait divers. Le dernier en date étant le faux restaurant à Londres classé premier sur TripAdvisor The shed at Dulwich, un canular monté de toute pièce par un plaisantin britannique au mois de décembre dernier.
Au delà de ces actualités croustillantes et ces débats souvent stériles, force est de constater que les avis clients sont désormais bien installés dans le paysage du web. Ils sont devenus une source intarissable de la voix du client et un formidable outil de gestion de la réputation et de management des équipes.
Il me semble loin le temps ou un certain Jeff Bezos, aujourd'hui l'homme le plus riche du monde, expliquait à ses fournisseurs que les internautes allaient noter leurs produits. Le chapitre consacré à la naissance d'Amazon en 1996 dans les différentes biographies de son fondateur fourmille d'anecdotes savoureuses dont celle où les éditeurs de livre lui font remarquer que ce n'est pas au lecteur d'écrire des critiques de livre.
Mais ça c'était avant...
Aujourd'hui, TripAdvisor compte plus de 661 millions d’avis et d’opinions et presque tous les sites d'e-commerce présentent des avis clients.
Les préjugés restent toutefois tenaces à ce propos. En voici quelques uns :
  1. Les internautes ne lisent pas les avis. FAUX. Selon une étude Fevad/Médiamétrie/Netratings, de septembre 2016, 49% des internautes recherchent des avis de consommateur pour choisir un produit sur un site. IFOP pour le compte de reputationVIP, nous apprend que 88 % des individus consultent des avis de consommateurs, des forums ou des blogs avant de réaliser un achat en ligne, 73 % avant un achat en boutique. Trustpilot, quant à lui, nous révèle qu'un tiers des internautes lisent toujours les avis, et un tiers "la plupart du temps". Seul un internaute sur 10 déclare ne lire que "rarement" ou "jamais" les avis. Voilà de quoi planter le décor et rappeler que le contenu généré par les internautes (UGC, User generated content) est un élément incontournable pour les marques et les entreprises. Comme je l'écrivais sur ce blog en 2009, nous sommes entrés dans le nouvel âge de la relation client. Internet est devenue une caisse de résonance phénoménale pour la voix du client.
  2. Les entreprises sous-estiment l'impact des avis clients. VRAI. Un étude d'OpinionWay nous le prouve : 66% des clients considèrent que les avis clients sont un élément essentiel de l’e-réputation d’une entreprise, alors que 20% des professionnels les jugent indispensables et 40 % pensent qu’ils ont un impact négligeable pour leur business. C'est une des voies de progrès essentielles, et elle concerne les professionnels les plus réfractaires à internet, comme par exemple les restaurateurs ou les hôteliers indépendants qui négligent leur réputation en ligne. 96% des internautes sont influencés par l'e-réputation d'une marque / enseigne lors d'un achat selon IFOP/reputationVIP. Les avis client participent à l'expérience du client à toutes les étapes de son parcours.
  3. Peu de clients rédigent des avis. FAUX. Selon l'étude Fevad/Médiamétrie/Netratings, de septembre 2016, 51% ds internautes ont donné une note ou un commentaire sur un produit acheté sur internet. Selon Eliaconsulting, 31% des Français donnent leur avis au moins une fois par mois sur des produits ou des services achetés. De quoi tordre le coup à la vieille règle du web qui prétend que pour 1% de producteurs de contenus et 9% de lecteurs actifs, on compte 90% de lecteurs passifs. Le client est devenu un producteur de contenu régulier, un observateur attentif et exigeant.
  4. Les clients qui écrivent des avis sont les plus mécontents. VRAI et FAUX. Selon Trustpilot, il est plus probable qu'un client mécontent écrive un avis qu'un client satisfait. Cette étude nous dit qu'il est "très probable" qu'un mécontent rédige un avis à hauteur de 33% vs 20% pour ceux qui ont vécu une bonne expérience. La majorité des avis ne sont pas rédigés par des clients mécontents, mais une insatisfaction sera plus motivante pour un client. La solution est de solliciter tous ses clients, adopter une posture d'écoute et de transparence, au profit de la confiance du client.
  5. Les avis clients ne sont pas spontanés. VRAI et FAUX, disons que 50% des clients jugent probable ou très probable le fait d'écrire un commentaire spontané vs un peu moins de 70% pour les clients qui ont été sollicités par une entreprise (selon Trustpilot). Les entreprises doivent entrer dans la conversation avec le client, susciter son engagement, d'autant plus que les clients apprécient des avis récents et nombreux.
  6. Les avis négatifs ruinent la réputation d'une entreprise ou d'un produit. VRAI et FAUX. Selon une étude de BrightLocal, 22% des répondants ont déclaré qu'un seul avis négatif pouvait les convaincre de ne pas aller dans un établissement local. S'il y a au moins trois avis négatifs, ce chiffre passe à 59%. 30% des internautes renoncent à l'achat s'ils trouvent une majorité d'avis clients négatifs (source IFOP). Les avis ont un impact sur la réputation d'une entreprise, d'un produit ou d'un service, c'est désormais un fait acquis. Mais 68% des clients ont davantage confiance dans les avis s'ils voient des avis positifs et négatifs ( Source Reevo sur Econsultancy), 95% des clients suspectent de la censure ou des faux avis s'ils ne lisent que des avis positifs (source étude Reevo) : deux chiffres qui sonnent comme une évidence. Le client cherche la vérité, l'équilibre et sera sensible au profil de l'auteur et à ses demandes. Lorsqu'on lit un avis on se projette dans sa propre expérience de consommation et on se forge une opinion personnelle en s'appuyant sur les nuances. J'ajoute que, selon Trustpilot, 60% des consommateurs consultent au minimum 3 avis à propos d’un produit
  7. La majorité des avis sont faux. FAUX. Il convient de rappeler que la pratique des faux avis concerne tous les secteurs d'activité comme le rappelle la DGCCRF et que, dans mon expérience (j'ai participé à la création d'un site d'avis) ce sont les professionnels eux-mêmes qui sont les fraudeurs. Un restaurateur qui demande à sa famille d'écrire des avis, un chef de produit qui écrit des louanges sur sa gamme... Les professionnels ont pu par le passé faire appel à des entreprises peu scrupuleuses pour rédiger de faux avis mais cette pratique semble se raréfier, comme le note cette enquête de Libération "Les faux avis, un business qui se tarit".
  8. Il est inutile de répondre à tous les avis. FAUX. Selon Trustpilot, 79% des consommateurs veulent voir les entreprises répondre aux avis négatifs. Répondre à un avis négatif est indispensable, ne serait-ce que pour donner aux lecteurs votre point de vue sur un incident, vous excuser (relire mon billet à propos des excuses) et montrer comment vous traitez les clients mécontents. Un avis négatif, c'est une réclamation en public, la mise en scène de votre orientation client. Répondre à un avis négatif, c'est prouver votre sensibilité à la satisfaction client. Je reconnais qu'il n'est pas aisé de gérer la masse d'avis client mais la bonne pratique est de répondre à tous les avis, positifs comme négatifs.  Répondre à un avis très favorable vous permet de remercier un client satisfait et vous assurer de sa fidélité. 
  9. Les avis ne valent pas une étude de satisfaction. VRAI et FAUX. Rien ne remplace une étude rigoureuse réalisée par des professionnels des études, mais rien n'est plus précieux qu'un commentaire spontané d'un client à propos de son expérience. La bonne pratique consiste à tirer profit de tous les canaux d'expression du client et d'en faire un véritable outil de management des équipes au quotidien. 
  10. Les avis sont de plus en plus fiables. C'est VRAI et je ne suis pas peu fier de l'affirmer. En avril 2011, alors que je travaillais dans une entreprise que j'avais co-créée (un site d'avis clients), j'ai eu l'idée de lancer une norme française pour aider les clients à y voir plus clair et pousser les entreprises à adopter les meilleures pratiques. Depuis, cette norme à laquelle j'ai participé activement avec 40 représentants d'entreprises sous la présidence d'un représentant de l'AMARC, est devenue une réalité en juillet 2013 en France, puis elle s'est transformée en norme internationale ISO publiée le 22 septembre 2018, avec le concours de 27 pays. Par ailleurs, la loi pour une République numérique d'octobre 2016, entrée en vigueur au 1er janvier 2018, renforce les obligations des sites Internet en s'inspirant des travaux de la norme NF Z 74-501. La DGCCRF est devenue plus experte dans la détection des mauvaises pratiques et les clients peuvent s'appuyer sur des certifications réelles et sérieuses. Si les normes et les lois ne font pas tout, la transparence progresse et s'impose sur internet au bénéfice de tous.
835ème billet de Thierry Spencer, auteur du blog Sens du client, Customer Relationship Storyteller à l'Académie du Service.

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