21 juillet 2009

Le Nouvel âge de la relation client

Lors de mon intervention à la convention de l'AMARC il y a quelques semaines, j'ai fait une démonstration intitulée Le nouvel âge de la relation client, avec le graphique en illustration de ce billet.
Souvenez-vous, on avait coutume de dire qu'un client mécontent en parlait à dix personnes et qu'un satisfait en parlait à 3 ou 4. Presque tous les responsables marketing client (et beaucoup de clients) connaissent ce chiffre à l'origine inconnue. Et pourtant même si son fondement reste obscur, connaissez-vous une statistique aussi célèbre que celle-ci et avec laquelle tout le monde est plus ou moins d'accord ?


C'est le premier stade de la relation client, celle que nous avons connu dans les années 80 et même bien avant, lorsque les mécontents n'avaient que leur plume pour se plaindre et que fonctionnait le bouche à oreille "à l'ancienne" (vers la famille, les amis ou les collègues de bureau). Sur 100 clients qui veulent s'exprimer -qui ont quelque chose à dire-, c'est l'ordonnée de mon graphique, environ 5 à 10% prenaient leur plume. Une minorité (la partie rouge du graphique) trouvaient un écho dans un quotidien national, à la radio ou à la télévision. Il fallait que ces pauvres clients soient lourdement handicapés suite à une grave faute d'une entreprise, aient de bonnes relations, profitent d'un marronnier ("les arnaques des vacances", "le Noël raté"...), ou tombent dans une période de pauvre actualité.


Avec le développement d'internet et l'ouverture des canaux de relation avec le client (dont le téléphone et ses hot lines), c'est le deuxième âge de la relation client. De 1998 à 2008, pendant le boom d'internet, la plume se transforme en clavier, le timbre et l'enveloppe disparaissent au profit d'un simple clic.
C'est ce qui faisait dire à
Jeff Bezos, le patron du plus gros site d'e-commerce mondial pour qui j'ai une grande admiration, Amazon.com : "Si vous rendez vos clients mécontents dans le monde réel, ils peuvent en parler chacun à 6 amis. Sur internet, vos clients mécontents peuvent en parler chacun à 6000 amis."
C'est l'époque ou la gestion de la réclamation client devient un métier organisé et prend place dans les entreprises. C'est la période du développement des bases de données et du CRM : on veut connaître et maîtriser la relation client. On constate à l'époque une augmentation substantielle des réclamations alors que l'offre supérieure à la demande rend le client infidèle et de plus en plus exigeant.
Les clients s'équipent et se connectent depuis leur domicile (souvenez-vous de cette histoire avec le client qui enregistre une conversation au téléphone avec AOL, la diffuse et passe à la télévision, lire mon billet de 2006) : la caisse de résonance des insatisfactions devient mondiale. La proportion de clients qui peuvent en toucher de nombreux autres est multipliée par 10. Un méchant billet sur un blog peut faire autant de mal qu'une minute au Journal de 20h de TF1.

Mais voilà qu'approche le Nouvel âge de la relation client. On perçoit déjà ici ou là les signes avant coureurs d'une vague déferlante dont les premiers héros (ou surfers si je puis dire) de 2009 sont Beckie Williams, cliente de Marks & Spencer qui fait plier l'enseigne anglaise avec 19000 personnes inscrites à son groupe sur Facebook (lire mon billet) et Dave Caroll le musicien, dont la guitare a été perdue par United Airlines : il compose une chanson et réalise une vidéo vue par 3,5 millions de personnes sur Youtube intitulée "United breaks guitar".
Les marques entrent dans une période où les clients vont vraisemblablement réduire leurs réclamations directes : c'est la partie "un client vers une marque", la partie blanche de mon graphique. Ce phénomène se fera vraisemblablement au profit des nouveaux moyens de communication que seront les réseaux sociaux du futur (dont Facebook, Twitter, Youtube et Myspace ne sont que les embryons), accessibles à tout moment depuis plusieurs terminaux dont le smartphone démocratisé. J'ajoute pour vous donner une idée de l'ampleur du phénomène qu'on estime à un milliard le nombre de personnes sur les réseaux sociaux en 2012.

L’enjeu sera bien la maîtrise de la "conversation" (lire mon billet sur la parabole du surfer d'argent), la partie rouge la plus à droite de mon graphique, quand la majorité des clients qui veulent s'exprimer le feront sur la place publique.
Responsables de la relation client et de services consommateurs, votre métier a de l'avenir !
Bientôt la fonction de Community manager (responsable de la gestion des communautés) se développera et les entreprises ne pourront pas ignorer la masse de clients qui s'exprimeront vers des millions d'autres, d'autant qu'ils sont invités à donner leur avis de plus en plus fréquemment (BING le nouveau moteur de recherche de Microsoft affiche d'ores et déjà aux Etats-Unis les avis de consommateurs avec les résultats, démonstration faite lors de la mission Ubifrance aux Etats-Unis). On pourra alors dire que le client sera roi, empereur ou dictateur, et que sa notoriété (ou celle de son avis) pourrait être l'égale de celle d'une marque au moment où il s'exprime.
Il faut réaffecter les investissements publicitaires vers le dialogue permanent et s'assurer que la marque tient toutes ses promesses.
Dans mon billet de début d'année sur les 10 tendances du sens du client 2009, en prétendant que le client sera social, j'étais très en dessous de ce qui arrive aujourd'hui.
Le nouvel âge de la relation client ne se cantonnera pas au marketing et à la communication mais va sans aucun doute bouleverser le management des entreprises.

Billet publié par Thierry Spencer pour le blog Sens du client

2 commentaires:

Francis a dit…

je ne connaissais pas cette statistique, par contre il y en a une fort connu. Celle du 80 / 20... mais c'est un autre domaine.
Quoiqu'il en soit, merci pour cette article retraçant l'histoire de la relation client.
Le marché devient de plus en plus transparent, on peut penser que cela ira avec une augmentation de sa qualité. On se rapproche du marché pur et parfait de nos cours d'éco...

Anonyme a dit…

Barbie le prouve. Le marketing est un mythe

http://ysengrimus.wordpress.com/2008/05/01/les-poupees-mannequins-ce-nest-pas-du-marketing/

un mythe surévalué
Paul Laurendeau