07 octobre 2018

Le client aux rayons X

Je me réjouis à chaque sortie d'une nouvelle étude sur l'expérience client et ce, pour plusieurs raisons. Tout d'abord, sa diffusion permet de sensibiliser encore davantage de personnes sur ce thème. Ensuite, les auteurs de l'étude (en l'occurrence BETC Digital et OpinionWay) sont de nouveaux entrants dans ce débat. Nouveaux émetteurs, nouveaux publics et nouvelle méthodologie, l'expérience client est la tendance du moment, renforcée par le livre de Brian Solis dont je me suis fait l'écho dans un de mes billets de tendances et qui appelle au rapprochement des disciplines et des angles d'analyse (UX, CX, BX, interfaces digitales, interactions humaines et expérience de marque). On ne dira bientôt plus que X pour qualifier l'expérience, quel que soit le canal et non plus CX, UX ou BX.
On pourra objecter que chaque commanditaire d'une étude développe une nouvelle méthode, annoncée comme "la première", la plus fiable et la plus complète. Disons que c'est un nouvel angle d'analyse et qu'il vient enrichir notre réflexion.
BETC Digital et Opinion way viennent de publier cette semaine "X INDEX, le premier baromètre français de l’expérience client" et je m'en réjouis. BETC Digital est une agence digitale qui prend la parole sur l'expérience client au sens large et non pas sur l'UX ou l'expérience digitale. J'y vois aussi le signe que l'expérience client devient le grand sujet de tous les prestataires de service et c'est tant mieux !
Ce que je retiens de l'étude :
  • Classement des 10 secteurs d'activité. De ce point de vue, pas grand chose de nouveau si je puis dire. On retrouve le secteur de la beauté en tête avec un score de 45 sur 100 (les notes vont de +100 à -100), suivi de l’hôtellerie. Le secteur automobile est toujours et encore, étude après étude, dans le ventre mou des classements avec une note de 27 et la banque est dans le fond du classement avec une note de 13, devant la distribution alimentaire avec une note négative de -20. Aucun secteur n'est dans l'excellence, mais des entreprises se distinguent.

  • Classement des entreprises. Premier toutes catégories de ce X Index, se trouve Yves Rocher, un habitué des podiums (dans le Top 10 de KPMG et gagnant du Podium de la relation client Kantar TNS Bearing Point l'an passé) qui obtient une note de 86 sur 100. Notons que ce classement ne prend en compte que 50 entreprises, liste dans laquelle ne figurent pas les habitués des podiums que sont Nespresso, MAIF, Mercedes, ING Direct, Decathlon, Toyota.... Deuxième avec une note de 66 sur 100, et pour le coup c'est une nouveauté intéressante, se trouve Netflix. La plateforme de streaming sur-performe sur la dimension "prise en compte de l'historique du profil client pour proposer des offres adaptées" avec une note de 7.4 sur 10 vs 6.2 pour la moyenne des 50 entreprises étudiées. Netflix se distingue sur la simplicité de l'expérience ("J'ai tout de suite compris comment faire pour obtenir ce que je cherchais"), qui est une façon de mesurer l'effort, Netflix obtient 8.2 sur 10, là où la moyenne est à 7.4. Troisième de ce podium, notre licorne nationale, j'ai nommé Blablacar qui obtient un score X Index de 64 sur 100. Blablacar n'est pas un nouveau venu dans les podiums relatifs à l'expérience client, ayant monté sur la première marche du podium de la relation client de sa catégorie avec KantarTNS BearingPoint cette année.

  • Les critères déterminants selon le modèle de la marque. C'est un des intérêts de cette nouvelle étude : l'analyse des critères déterminants selon le profil de la marque. Pour les marques "bricks and clicks" (celles qui ont un pied dans le monde réel et l'autre sur internet), le critère discriminant N°1 est "L'écoute et l'efficacité des vendeurs en magasin/le personnel/les conseillers en agence", le deuxième est "la capacité à comprendre les besoins et à répondre aux demandes du client". Pour les marques "digital-natives", le première critère est "les informations disponibles sur le site", suivi de l'expérience agréable ("j'ai passé un bon moment"). Je peux lire dans le livre blanc publié à l'occasion que "la dimension émotionnelle arrive comme le 2ème critère le plus important pour les digital-natives… Il est révolu le temps d’un achat uniquement pratique effectué sur Internet, il faut aussi que l’expérience qu’on me propose soit agréable et enrichissante, voire qu’elle me touche. Le futur du digital est à l’émotion.". L'analyse est tout à fait juste et la preuve est apportée.
  • L'importance des dimensions dans l'expérience. BETC Digital et Opinion Way nous apportent une nouvelle confirmation (après une étude semblable réalisée par Teleperformance et son CX Lab) que les critères relationnels ("capacité à remercier, récompenser la fidélité, la prise en compte de l'historique du profil") comptent pour 52% de la note relative à l'expérience client, vs 32% pour l'achat lui-même (achat fluide, agréable) et "seulement" 16% pour la marque (attachement à la marque, fait de tenir ses engagements). Un tel chiffre devrait par exemple faire réfléchir les constructeurs automobile qui mettent le poids du cors sur la marque et investissent trop peu dans la relation.

  • Le facteur humain comme marqueur de l'expérience client. Les marques "bricks and clicks" du top 10 (Yves Rocher, Disneyland, Crédit Mutuel, Marionnaud et Leroy merlin) se démarquent par la capacité d'écoute et l'efficacité de leurs employés, ainsi que par la capacité à comprendre les besoins du client et répondre à ses demandes. Ce que BETC Digital et Opinion way appellent le "facteur humain" contribue à hauteur de 11% au score X index des marques digital natives (vs 21% pour les "bricks and clicks"). Un résultat qui fait dire une fois encore que le digital doit rester un moyen au service de la relation humaine et pas une façon de se passer d'elle.
  • L'expérience client fluide est une dette, une bonne formule de BETC Digital pour illustrer le fait que la fluidité de l'expérience ("toutes les étapes se sont bien enchaînées" contribue à hauteur de 21% à la bonne expérience client pour les entreprises bricks and clicks et 31% pour les digital natives. Les 10 entreprises distinguées par l'étude obtiennent un bon score sur cet angle (entre 7.6 et 8.1 vs 7.4 pour la moyenne des 50 marques).
  • La récompense de la fidélité est le critère le plus mal noté. La prise en compte de la fidélité impacte de 12% l'expérience et on ne s'étonnera pas de voir Yves Rocher en tête du classement, une entreprise qui se distingue par la reconnaissance de ses fidèles clientes. A noter : l'étude nous apprend que c'est le critère le plus mal noté par les 5000 clients interrogés. C'est une dimension que j'ai l'habitude de traiter chaque année sur mon blog à l'occasion de la Saint Fidèle au mois d'avril et ce résultat qui me désole ne me surprend pas.
  • L'émotion comme source de différenciation. La dimension émotionnelle contribue elle aussi au X Index et BETC Digital appelle à la création de "signature moments", les fameux moments de vérité ou moments mémorables créateurs de valeur pour les marques. Fait étonnant, cette dimension contribue à hauteur de 9% à la qualité de l'expérience pour les entreprises Bricks and Clicks et 15% pour les digital natives.
839ème billet de Thierry Spencer, auteur du blog Sens du client, Customer Relationship Storyteller à l'Académie du Service 

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