27 novembre 2016

Expérience client : adopter et dépasser les nouveaux standards. Une conférence avec UGC, Darty et Corsair

Customer Relationship Meetings
Lors de l'édition 2016 des Customer Relationship et Marketing Meetings à Cannes, s'est tenue une conférence que j'ai eu le plaisir d'animer, réunissant trois marques qui ont témoigné à propos des nouveaux standards de l'expérience client.
Trois professionnels représentants trois secteurs très différents témoignaient de leurs enjeux en termes d'expérience client : Darty, le category killer de la distribution spécialisée avec 60 millions de clients et 180 millions de visiteurs sur le site, UGC et ses 407 salles en France qui accueillent 34 millions de spectateurs, et Corsair, filiale du Groupe TUI, qui fête ses 35 ans et transporte vers de belles destinations (Caraïbes, Océan Indien...) plus de 1,2 millions de clients chaque année.
L'évolution des attentes client
Pour UGC représenté par Francis Barbier-Martins, Directeur de la relation client : "à l'origine le service UGC illimité était outsourcé, les autres services internalisés. En 2006, nous avons pris la décision d'internaliser, ce qui a conduit à une baisse de 70% des réclamations. Graduellement, nous avons senti une évolution des comportements et attentes clients et en 2008, le self care a été mis en place sur le site. Les clients avaient envie de prendre la main sur leurs données administratives. Automatiquement, les contacts ont chuté de 35% et la satisfaction a gagné 50%. En 2016, nous innovons encore avec le lancement de l'abonnement 100% en ligne avec tout de même une carte physique (qui devrait être dématérialisée bientôt) et la création de la formule à deux personnes. En 6 mois, 25% de nos ventes ont été réalisées sur le web et nous n'avons pas perdu de ventes en salle.
Clairement, les clients attendent plus de temps réel, davantage d'immédiateté. Paradoxalement, malgré l'apport des technologies, le client réclame un contact humain : 50% de nos contacts sont téléphoniques. Les clients veulent plus de souplesse dans les échanges et nous donnons aux collaborateurs une plus grande latitude de gestes commerciaux. A ce propos, nous avons observé que les collaborateurs ayant cette liberté s'avèrent plus conservateurs."
Pour DARTY représenté par Laurent Escarieux, Directeur de la Relation Client Grand Ouest: "Nous avons les mêmes clients ! Les clients sont pressés, ils sont davantage connectés. Ils veulent leur produit tout de suite. En magasin, ils attendent un comptoir dédié s'ils commandent en ligne. S'ils se font livrer, ils attendent des créneaux plus étroits. Idéalement, au SAV, les clients s'attendent à repartir avec le produit réparé. Etre connecté, c'est interagir tout le temps, quand j'ai décidé : le soir sur mon smartphone, le lendemain en magasin, le week-end sur internet. Le client veut entrer en relation avec le canal de son choix, et il a besoin d'informations fiables"
Pour Corsair et Stéphanie de la Roncière, sa Responsable Marketing et Service Client  : "La forte concurrence de notre secteur exacerbe les attentes en termes de prix. Les clients veulent une expérience facile, ils comparent ce qu'ils vivent au quotidien avec ce qu'ils vivent lors de leur voyage. Par exemple la navigation sur une tablette personnelle comparée à la navigation sur un système de divertissement à bord. J'ajoute que tout ce qui est facilitateur du transport est clé : web check in, dépose bagage automatique, ce genre de services restent très attendus. Nous avons beaucoup de demandes en termes de personnalisation : de la personnalisation de la relation à la petite attention lors d'un échange."

Les challenges de l'expérience client
Pour Laurent Escarieux de Darty, "Immédiateté et personnalisation sont les deux piliers. Partant du principe que ça coûte moins cher de faire bien du premier coup, on règle les problèmes le plus vite possible. Voilà pour l'immédiateté. Pour la personnalisation, le client veut sortir de l'uniformité, il veut du sur-mesure dans les services, comme le choix entre livraison et emporté par exemple."
Selon Stéphanie de la Roncière de Corsair, "il est difficile de se distinguer sur la classe économique où les compagnies vont peu ou prou offrir la même expérience, la différenciation se joue dans ce cas sur le respect de la promesse (ponctualité,...), auquel j'ajouterais l'intelligence du service client, la prise d'initiative du personnel, le geste personnalisé. Sur la classe business, les moyens mis en oeuvre permettent un service différencié sur l'équipement, les sièges, le produit lui-même. Qui dit business dit comportement du personnel et produits différents. A l'international, notre challenge est que les coûts structurants font que les compagnies européennes ne se battent pas avec les mêmes contraintes que les compagnies du Golf par exemple. Notre enjeu est bien de nous réinventer en faisant fonctionner notre modèle."
Pour Francis Barbier-Martins d'UGC,  "Chez UGC on considère que l'expérience client n'est réussie que si l'on a une adhésion en interne. A chaque nouveau concept ou nouvel outil, on se demande si ça va profiter au client, à UGC et au collaborateur. Si c'est un avantage pour les trois, on met en place. 
L'évolution de l'expérience client a été constante grâce à une remise en cause permanente des acquis... A chaque nouveau service mis en place, je considère que les standards ne sont plus valides après une durée d'un an. 
Avec de nouveaux moyens d'écoute client, tels que Critizr par exemple, j'ai découvert que certaines informations ne me remontaient pas auparavant. J'ai été sensibilisé aux incivilités dans les salles avec les téléphones portables ou à la propreté des toilettes dans une salle précise. Ces remontées me permettent d'améliorer sans cesse l'expérience client."

L'amélioration de l'expérience
Chez Darty"Quand on appelle l'assistance technique des produits bruns (TV, HiFi, Video, Multimedia), 2 fois sur 3 on arrive à résoudre le problème par téléphone, ce taux de résolution est moins bon pour l’électroménager. Pour augmenter ces taux et traiter l'attente d'immédiateté, la visio liée au bouton Darty a été mise en place (le client appuie sur son bouton -un objet connecté à son domicile ou une application- et un conseilleur lui propose un échange via la caméra d'une tablette ou d'un smartphone). Elle répond à deux problématiques : c'est un moyen de résoudre immédiatement les problèmes et c'est une relation face-à-face, un rapport humain avec l'aide de la technologie.
Autre initiative : on pourra prendre rendez-vous depuis le site au sujet de certains produits, avec un expert en magasin
Par ailleurs, nous avons équipé la quasi totalité des vendeurs de tablettes. Plus besoin de s’asseoir et consulter un ordinateur, le vendeur consulte la disponibilité au dépôt, les créneaux de livraison...et bientôt vous encaisser. Sur le volet personnalisation, les vendeurs ont un mail personnel qui leur permet d'échanger avec le client et demain échanger en direct.
Dans certains magasins, on peut se signaler lors du retrait d'un produit et on reçoit un sms sur le smartphone. C'est une file d’attente virtuelle très bien perçue par le client.
Nous avons créé également les ateliers Darty : on déporte notre compétence technique en magasin pour intervenir sur place. On rapproche nos compétences du client pour être plus immédiat."
Pour Corsair, "la création de la business class cette année chez Corsair est un véritable défi pour nous, un projet très structurant. Pour être prêts il nous faut aligner les planètes si je puis dire, des process à l'équipement jusqu'aux nouveaux standards de service.
Nous avons décidé de travailler l'axe de la différenciation par notre taille. Nous sommes en mesure d'aller chercher des produits exclusifs que les compagnies plus importantes ne peuvent pas s'offrir, tel ce vin en quantité limitée d'un viticulteur, ce produit cosmétique original, ou encore cette pâtisserie unique...
Et enfin, nous cherchons à développer l'autonomie des collaborateurs du service client, en interne et chez nos prestataires. Dans les centres d'appels, où tout est codifié, processé, calculé, l'initiative n'est pas développée chez les agents. Pour les préjudices dits "émotionnels" nous favorisons les petites attentions en adéquation avec le client, un geste au choix du collaborateur. Nous obtenons la reconnaissance de la part du client, ce qui est positif pour les collaborateurs."

L’équilibre de l'expérience digitale / monde réel.
Pour UGC,  "la perception et l'utilisation du digital est différente selon les sociétés. Pour les natifs digitaux, il faut pousser l'expérience équilibrée, trouver un équilibre entre digital et expérience réelle. Le digital doit être un levier vers le réel.  Il ne faut pas trop titiller le risque de fatigue d'hypermodernité de la génération 35-49 ans. Nous devons garantir les fondamentaux de notre métier tout en restant à l'écoute du digital. Comme disait Harry Connick Jr à la fin du film Copycat, "keep it simple!" ".
Chez le distributeur Darty, "Internet et magasin sont complémentaires et indissociables. Ils se complètent et s'enrichissent. Le digital remplace une partie des tâches monotones à faible enjeu et permet à l'humain de se concentrer sur des tâches intéressantes, à valeur ajoutée, sur lesquels il va tirer son métier vers le haut. Il va être d'une efficacité accrue dans l'intérêt du client."
Pour la compagnie aérienne Corsair "Le digital est partout dans l'expérience de voyage à bord et au sol, pour nos clients comme pour nos collaborateurs. C'est un grand facilitateur du voyage, d'autant que dans les expériences de voyage, le client connait des situations de stress de l'heure d'embarquement, d'angoisse à l’enregistrement comme au filtre de police. On attend des personnes en contact qu'elles soient empathiques, bienveillantes, rassurantes, dans une expérience simplifiée et facilitée par le digital. Pour nous la digitalisation va dans le sens d'une plus grande personnalisation."

Un billet écrit par Thierry Spencer, auteur du blog Sens du client et Directeur Associé de l'Académie du service.

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