26 février 2006

Un vieux coup de pub pour le sens du client

C'est incontestablement d'abord une belle histoire. Monsieur et Madame Reis (photo ci-dessus Keith Hale/Suntimes photo), séparés par la Seconde guerre mondiale, s'offrent en 1946 un séjour à l'hotel Drake de Chicago pour leur nuit de noces. 60 ans plus tard, ils se présentent pour fêter leurs noces de platine dans le célèbre établissement sur les bords du lac Michigan, ayant accueilli entre temps le Prince Charles, Winston Churchill et Marylin Monroe. Munis de leur facture de l'époque d'un montant de 7 dollars la chambre, Monsieur et Madame Reis réservent une suite le 14 février dernier.
Le directeur de l'Hotel, Martin Wormull, plutôt que d'appliquer le tarif actuel de 1000 dollars la nuit, décide de leur facturer les 7 dollars de 1946. C'est au journal Chicago Sun times qu'il déclare "les habitants de Chicago nous sont fidèles, l'Hotel Drake veut leur témoigner la même fidélité".
Ce qu'il faut retenir ici, c'est qu'une petite attention portée à ses clients, bien médiatisée par une habile couverture presse et internet, vaut plus qu'une traditionnelle campagne de publicité. Comme quoi, le sens du client combiné au sens de la communication, offre un levier de communication puissant et très rentable en termes d'investissement...

25 février 2006

Un article du magazine Marianne

Dans le numéro 462 daté du 25 février 2006, un dossier du magazine Marianne intitulé "Les clients sont-ils des gogos ?".
Signe des temps, la presse magazine s'intéresse au sujet qui me passionne. Leur axe est la déshumanisation du rapport client/fournisseur, conséquence de la guerre que se livrent les fournisseurs d'accès et opérateurs de téléphonie. Les exemples donnés (Noos, wanadoo, Free, Ikéa) sont très orientés sur un ou deux secteurs, limitant leurs investigations à la relation à distance. Beau sujet et bel effort tout de même ! Et j'aime beaucoup le titre du sujet d'Anne Alter "le client roi est nu !"

23 février 2006

Amazon.com a-t'il perdu le sens du client ?

Mon bon vieux site amazon.com !
Amazon, dont j'ai rebattu les oreilles de mes collègues, clients, présidents, étudiants pendant des années a perdu un peu de terrain dans la relation qu'il entretient avec moi. J'ai rempli mon profil complet, fait part de mes préférences, répondu aux questionnaires de satisfaction, enrichi ma liste de souhaits depuis plus de cinq années et me voilà aujourd'hui un peu déçu. Dans mon petit coin secret (en haut à droite de la home page qui s'intitule GOLD BOX), je trouve dix offres spéciales qui me sont réservées pendant une heure et pas plus.
Ce soir, la première offre est une montre (avec une pub pour du vin), la deuxième est un livre de Charles Stross (?), la troisième une boite de vitamines, la 4ème un livre de Richard Morgan (?), la cinquième un livre sur les écrivains, la sixième un livre de C. Stross à nouveau, la septième un ballon de football agréé FIFA à 43 dollars, la huitième un roman Star Wars (j'adore Star Wars mais je déteste toute la littérature qui en est dérivée), la 9ème un livre de recettes pour écrire un livre et enfin à nouveau un livre sur le même sujet.
Est-ce mon intérêt qui s'est émoussé du fait de la banalisation des offres personnalisées ? Est-ce mon niveau d'exigence qui a augmenté ? Est-ce ma lassitude naturelle pour une innovation qui date de plus de cinq ans ? Mais enfin, je n'ai jamais désiré une montre de plongée, un ballon de foot et une boite de vitamines !
J'ai l'impression qu'Amazon est sur la voie du mass marketing. Pure-player-leader-mondial, Amazon doit maintenant me vendre des produits rentables et dont la pertinence est tirée par les cheveux... Je préférais l'époque ou ma Gold Box était gérée par un ordinateur nourri de formules mathématiques complexes et ou mes idées venaient du filtrage collaboratif. Aujourd'hui, il y a un chef de produit Gold Box qui donne des ordres à mon ami l'ordinateur et lui inculque des règles commerciales standard. "Monsieur Spencer a acheté pour plus de 100 dollars dans les 2 derniers mois = on lui propose le ballon de foot à 40 dollars".
La question que je me pose est : la relation client est-elle compatible avec le mass marketing ? L'extension de l'offre (Amazon.com vend des jouets, des médicaments, de la nourriture, des chaussures et des pneus) n'est-elle pas paradoxalement restrictive pour mes passions et mes aspirations ? Une telle gamme pousse à proposer à tout le monde la même chose par défaut (ce que dicte le profit mais pas la relation client), à la manière de la Redoute qui asile dans ses colis les mêmes offres pour tous !
Amazon.com aurait-il perdu le sens du client pendant sa croissance ?

18 février 2006

Un service consommateurs à la masse


Vous pensez en voyant cette photo que je me brosse les dents avec de la lessive ?
Rassurez-vous, je suis sain d’esprit.
Simplement, je voulais vous raconter une belle histoire de client. J’ai adressé le 28 janvier un courrier de réclamation au service consommateurs de Colgate Palmolive (2,9 milliards de dollars sur le 4ème trimestre 2005, 361 millions de dollars de bénéfice net sur la même période), accompagné d’un tube de lessive Génie dont le tube s’était fendu en le vissant (un problème de faiblesse du plastique). Je demandais alors une explication sur ce problème venant de la personne qui a décidé (pour améliorer la marge de Génie) de réduire la qualité du bouchon.
La réponse m’a été envoyée le 7 février (un délai très correct de réponse à un courrier) accompagnée de deux coupons de 2 euros de remise sur un produit Colgate.
Je vous livre ci-après un extrait de la réponse : « Nous vous remercions de nous avoir fait part de votre insatisfaction lors de l’utilisation de notre lessive GENIE. Nous sommes heureux de pouvoir vous aider. »
Tout d’abord, la lettre est personnalisée au nom du produit, ce qui est le minimum pour un service consommateur. Première procédure respectée.
« Notre société a mis en place des procédures minutieuses et rigoureuses de contrôle qualité. L’emballage est vérifié au moyen de scanners électroniques ainsi que par les membres de notre personnel chargés de l’Assurance qualité qui vérifient le processus de remplissage. »
Une formule type « copiée-collée » qui doit correspondre à un problème standard des produits en tube ; il est légitime de leur part de rappeler qu’ils consacrent des ressources techniques (des scanners) et humaines (des membres du personnel) à la qualité. Le modèle de lettre commence à être faible dès qu’ils me parlent de remplissage (rappel : mon problème concerne le bouchon).
« Malheureusement, malgré tous ces contrôles qualité, il peut arriver exceptionnellement… ». Ici on rappelle au client que Colgate Palmolive n’est pas à l’abri d’un fait du hasard en dépit de lourds investissements.
Donc, reprenons la suite : «… il peut arriver exceptionnellement que la base d’un tube de dentifrice n’ait pas été correctement soudée. Nous regrettons que vous n’ayez pas obtenu les résultats que vous attendiez. Veuillez accepter ce que nous joignons à ce courrier, avec nos compliments. »
C’est là où notre affaire devient surréaliste car, comme vous l’avez compris, mon problème de bouchon de lessive devient un problème de tube de dentifrice.
Ce qu’on doit retenir ici c’est la faiblesse de l’investissement de Colgate palmolive dans son service consommateurs. Le courrier a été lu rapidement et une réponse standard lui a été appliquée. Moralité : quand on vend des produits de masse et qu’on fait du marketing de masse, on ne peut pas s’empêcher de faire du service consommateurs de masse.
Comme si les marques nées dans les marchés de masse étaient liées à une espèce de destin marketing pour toute leur vie. A quoi bon investir des millions dans la recherche et le développement, faire des pré-tests onéreux et payer des cabinets pour créer un produit si au final on n’est pas capable de tirer les enseignements de l’utilisation de ces produits ? Le marketing produit est donc bien toujours et encore prédominant.
Je formule le souhait que ma lettre a été envoyée au chef de produit GENIE Gel express afin qu’il en tire tout le bénéfice. Ma lettre n’est peut-être qu’une malencontreuse erreur de communication… En attendant, c’est une preuve que Colgate Palmolive n’a pas le sens du client.

15 février 2006

Deux femmes qui ont le sens du client

Je trouvais que mon blog manquait d'une touche féminine, c'est réparé à compter de ce jour car je vous invite à lire les deux contributions suivantes :

Nicole Berger (à gauche sur la photo) :

Qui êtes-vous ?
Directeur de Projet, j’ai conduit et supervisé les mises en œuvre de solutions CRM stratégiques. Auteur du livre "Le projet RELATION CLIENT, après les constats d'échec, une démarche CRM pragmatique…" édité chez Nieuwbourg Group, je dirige aujourd'hui le cabinet de conseil Accoval spécialisé dans l'accompagnement et la valorisation des projets d'optimisation de la Relation Client.

Selon vous, pour une entreprise, qu’est-ce qu’ «avoir le sens du client» ?
Avoir le sens du client passe par une bonne connaissance de celui-ci : Qui est mon client ? Quel est son profil ? Qui est mon interlocuteur ? Qu'a-t-il déjà acheté ? Quels sont les accords contractuels dont il bénéficie ? Quelles sont les offres susceptibles de l'intéresser ? Quels sont les problèmes qu'il a rencontrés ? Que s'est-il passé lors de nos derniers échanges ? Autant de questions auxquelles les entreprises doivent pouvoir répondre pour optimiser leur réactivité, adapter les plans de fidélisation mais aussi accroître le niveau de satisfaction du client.

Que pensez-vous de l’évolution de la relation client en France ?
L'entreprise change, nous sommes dans une ère de plus en plus mouvante où priment rapidité, réactivité, justesse de la cible. Les clients ont des exigences de plus en plus fortes. Face à la concurrence, l'entreprise doit rester compétitive tout en s'inscrivant dans une relation client-fournisseur proche du partenariat.

Avez-vous une anecdote, un exemple de relation client remarquable ?
La relation client vue par Pampers. Deux mois après la naissance de son fils l'un de nos collaborateurs a reçu de la part de Pampers un courrier notant que son fils avait maintenant deux mois et qu'à cet âge il fallait penser aux vaccins. La liste de ceux auxquels il fallait penser était précisée. Une bonne stratégie pour s'assurer de l'attachement à une marque, non ?

Andréa Fougerosse (à droite sur la photo) :

Qui êtes-vous ?
CRM et Internet Manager pour Saab. J’ai commencé ma carrière dans la base de données clients, pour évoluer vers des fonctions CRM puis Internet.

Selon vous, pour une entreprise, qu’est-ce qu’«avoir le sens du client» ?
Le sens du client, c’est partager avec lui une belle histoire de marque. C’est orienter la stratégie de la marque dans le but de le servir. Il s’agit tout d’abord de l’apprivoiser, d’apprendre à bien le connaître, de nouer avec lui une relation sérieuse marquée par des rendez-vous et lui proposer le produit qui le fait rêver au bon moment.

Que pensez-vous de l’évolution de la relation client en France ?
La relation client a subi des transformations majeures ces 25 dernières années. Nous sommes passés d’un marketing direct de masse à des tentatives de « one to one » ou de « one to few ». Les prochaines années s’annoncent riches en évènements grâce aux nouvelles technologies. Si le client le consent, la relation que sa marque favorite développe avec lui l’accompagnera où qu’il soit.

Avez-vous une anecdote, un exemple de relation client remarquable ?
Lorsque qu’une marque animée par des passionnés s’adresse à une population de passionnés, et que la magie de la relation opère, un simple magazine de marque devient un rendez-vous à ne pas manquer. Le Saab Magazine est envoyé à seulement 17 000 de nos clients. Nous devons faire une sélection parmi nos meilleurs clients. Il n’est pas rare que je reçoive dans ma boite email des messages de clients nous félicitant pour ce magazine et souhaitant, sans input aucun, se réabonner.

12 février 2006

L'alter-client contre le "client qui pue"

Pour l'ouverture des soldes en France, le groupe UMP "Utiliser des Mômes Pue" accompagné d'un membre de la BAC "brigade activiste des clowns" et des "dégonflés" (qui s'étaient illustrés par leur action sur les pneus de 4x4 dans Paris) ont laissé des boules puantes dans les magasins H&M et GAP avec quelques messages bien sentis sur l'exploitation des enfants par les fabriquants de produits textiles, tels que «Pour avoir des prix les plus bas, les enseignes accentuent la pression sur les sous-traitants. Au final, l’espérance de vie des ouvriers baisse. Les clients sont complices en voulant changer de jeans dix fois par an».
L'action non violente, teintée d'humour potache et de gauchisme bon enfant revendiqué, est à nouveau très significative des sujets dont on s'empare et dont on se fait l'écho en ce moment.
Un blog http://liberezlesenfants.blogspot.com/, quelques boules puantes et hop, on passe à la télé chez Ruquier !
Un bel écho pour une petite goutte d'altermondialisme provoquante. J'ai le sentiment que nos jeunes amis découvrent le monde tel qu'ils ne veulent plus le vivre. En lisant les messages publiés sur ce fameux blog, je vois que le sujet emballe tout le monde et surtout de jeunes consommateurs. Que réclament-ils ? Plus de boules puantes bien sûr mais aussi une action plus étendue et une prise de conscience de chacun. Or, la situation est bien plus complexe que ça.
Nos jeunes "alter-clients" prennent surtout conscience de leur totale et insupportable schizophrénie. Habillés eux-mêmes de vêtements fabriqués en Chine ou en Afrique du nord depuis des décennies dans des conditions opaques, nourris par le salaire de leurs parents souffrant de précarité pour cause de mondialisation, défendus par des syndicats qui défilent avec des banderolles rouges "made in China", leur pouvoir d'achat est réduit et ils achètent des produits moins chers. Une boucle infernale dont ils se demandent comment sortir. Il n'y a pas beaucoup de solutions à vrai dire. Idéalement qui devons-nous être ? Des femmes et des hommes éduqués (dans le sens "qui est allé à l'école assez longtemps"), des clients matures (dans le sens "je ne suis pas dupe des discours des entreprises") , des électeurs responsables (dans le sens "j'ai au moins ma carte d'électeur et je demande des comptes aux élus"), des actionnaires lucides (dans le sens "je ne joue pas en Bourse sans savoir à qui profite la spéculation") et enfin des salariés impliqués. Un salarié impliqué va agir au quotidien dans son entreprise et défendre ce nouveau sens du client qui consiste à réunir "l'alter-client" et le "client qui pue". Les entreprises qui émergeront seront certainement celles qui défendront la transparence et le langage de la vérité. Ca va pas être facile.
En attendant, une bonne vieille boule puante est la bienvenue si ça peut faire réflechir quelques milliers de clients et de marketers...

Client roi du service public !

Lu dans Libération ce samedi 11 février, un article sur l'annonce par Jean-François Copé, Ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat (en photo), du lancement du processus "QualiMarianne". Lançée par le gouvernement Raffarin en janvier 2005 et son Secretaire d'Etat à la réforme de l'Etat de l'époque, Eric Woerth, la Charte Marianne http://www.chartemarianne.gouv.fr/ vise à garantir la qualité de l'accueil dans les services publics. 1650 services de l'Etat français s'engagent à promouvoir les valeurs de "courtoisie, d'accessibilité, de rapidité et de clarté des réponses dans un esprit d'écoute, de rigueur et de transparence". Un programme très ambitieux qui a mis du temps a être à nouveau relayé par le nouveau Ministre en charge. J'ai pu constater par moi-même dans mon bureau de Poste que l'affiche commencait à jaunir depuis un an.
Pour reprendre les mots de Jean-François Copé cité par Libération"L'usager qui paye ses impôts est client du service public et, quand on est client du service public, on est roi." Fichtre ! Voilà bien un discours de Ministre aux accents sarkoziens pour lancer la certification des services publics en termes d'accueil. On notera que sous l'appellation "accueil" on trouve beaucoup de variables constitutives de la satisfaction de l'usager. Je ne peux que saluer cette excellente initiative publique qui, par son écho, devrait faire prendre un coup de vieux aux entreprises qui n'ont toujours pas investi un euro dans la mesure de la satisfaction. La démarche est très bien menée par des fonctionnaires qui ne manquent pas de méthode et qui n'ont pas hésité à me faire parvenir un dossier papier complet sur le sujet il y a quelques mois. J'ai eu l'occasion il y a peu de temps d'en parler à l'ex-Ministre Eric Woerth qui m'a promis une contribution sur mon site www.sensduclient.com.
Prochaine étape : la fidélisation ou comment retenir les contribuables français sur le territoire. On a pu à ce propos observer une variation du "churn" (attrition) avec la demande de Johnny Hallyday d'être naturalisé belge...

02 février 2006

Michel Badoc et le Sens du client

Une nouvelle contribution vient enrichir mon blog, celle de Michel Badoc.

Qui êtes-vous ?
Professeur de Marketing au Groupe HEC. Expert-consultant en Marketing Bancaire. Auteur de nombreux articles et ouvrages dans ce domaine. Le plus récent : « Réinventer le Marketing de la Banque et de l’Assurance » Revue Banque Edition en collaboration avec Elodie Trouillaud.

Selon vous, pour une entreprise, qu’est-ce qu’ "avoir le sens du client" ?
Accorder une priorité aux attentes et besoins de ses clients plutôt qu’à ceux de son entreprise et de ses collaborateurs.
Que pensez-vous de l’évolution de la relation client en France ?
Elle est de plus en plus forte dans le discours des dirigeants, de moins en moins présente dans la réalité (publicités de mauvais goût y compris pour les ONG, invasion des boites aux lettres et internet par des spams, vendeurs peu formés et sans scrupules.

Avez-vous une anecdote, un exemple de relation client remarquable ?
Site commercial d’Amazon.com. Politique relationnelle de la MAIF avec ses clients et prospects.