23 septembre 2021

Mon introduction du manifeste de la Symétrie des attentions sur les entreprises à mission

Fort de l’édition 2020 qui présentait la Symétrie des Attentions de façon holistique et de l’édition 2021 qui plaçait l’attention sur la place des femmes dans les organisations, l'Académie du service propose pour la troisième édition de son manifeste dont j'ai le plaisir d'être le co-auteur, un focus sur l’Entreprise à Mission, un sujet pour lequel l’intérêt croissant des entrepreneurs, des managers et de l’ensemble de la société civile ne peut que me réjouir.

Cet ouvrage, qui sort ce vendredi 24 septembre à l'occasion du colloque annuel de l'Académie du service, fait la part belle aux témoignages de tous horizons, masculins et féminins, entrepreneurs, manageurs, chercheurs et juristes. Nous avons donné la parole à notre écosystème, aux clients de l'Académie du Service et leurs équipes, nos partenaires, nos confrères, ainsi que les entreprises incontournables sur ce sujet. Nous souhaitons proposer un petit manuel joyeux, éclectique et pratique sur l’Entreprise à Mission, ponctué de chiffres, d’expériences, de citations. Comme le précise Anne Mollet, Directrice générale de la Communauté des Entreprises à Mission, « le statut de société à mission transforme la gouvernance, le management, la relation à l’actionnaire ». C’est un long chemin exaltant et désormais presque incontournable.

Il n'y a pas de bonne expérience client sans bonne expérience collaborateur, il n'y a pas selon moi d'expériences réussies sans des personnes pour la faire vivre qui connaissent le sens de leur action individuelle et collective, ce que l'on nomme la raison d'être.

Je vous propose de découvrir ici mon introduction à ce livre qui lève le voile sur une de mes expériences professionnelles et fait le lien avec le thème de ce troisième manifeste.

EXTRAIT DU LIVRE : "SYMETRIE DES ATTENTIONS LE MANIFESTE EDITION 2022 LES ENTREPRISES A MISSION Ouvrage collectif coordonné par Louise Browaeys, Jean-Jacques Gressier et Thierry Spencer.

 J’ai mis beaucoup de temps à comprendre à quel point ma première expérience professionnelle avait été déterminante pour moi. 

Je suis entré à la CAMIF en 1991, date à laquelle l’entreprise était le 3ème vendeur à distance en France, pionnier du numérique, champion de la relation client et du service. J’étais en charge du parcours des nouveaux clients, issus de la MAIF. A Niort, on ne disait d’ailleurs jamais client, on disait sociétaire, détenteur d’une part sociale. J’y ai rencontré des militants de la MAIF qui m’ont initié aux valeurs de l’économie sociale, à l’esprit mutualiste. Les personnes qui m’ont formé m’ont démontré les vertus de ce modèle considéré à l’époque comme, disons-le, dépassé et presque ringard. Au sortir des années 80, comment apprécier ce modèle sans paillettes et sans stock-options, sans promesses glamour et publicités ronflantes ? Je me souviens que le rapport annuel de l’époque portait le titre « Ethique et performance », une façon de rappeler cette croyance profondément ancrée dans l’entreprise : on peut gagner de l’argent, se développer sans renier ses valeurs. Rien de ce qu’on m’avait enseigné dans mon école de commerce… Cette croyance s’est perdue, la culture a évolué. Sans que personne ne saisisse l’enjeu, la déchirure, le virage qui s’amorçait, la CAMIF a suivi une voie dictée par ses dirigeants de l’époque qui ne rêvaient que d’une chose : faire comme tout le monde et adopter les codes de l’économie libérale. Cela voulait dire se battre sur les terrains de la promotion ravageuse, du prix agressif, des produits sourcés aux quatre coins du monde, du service différencié, des alliances douteuses… La CAMIF avait oublié qui elle était et pourquoi elle existait, en bref, elle effaçait sa raison d’être.

En mai 1997, le Président de la MAIF, société dont le fondateur avait 50 plus tôt créé la CAMIF, invite les dirigeants de la coopérative à « infléchir ses orientations alors qu'il en est encore temps » . Le Président de la CAMIF lui répond en fustigeant « (…)les visions d'un autre âge économiquement suicidaires, politiquement erronées et philosophiquement passéistes » (propos rapportés par les Echos). Les années suivantes vont montrer cruellement que sa vision était troublée et qu’il avait tort. En octobre 2008, la CAMIF est mise en liquidation judiciaire.

Pendant cette période la MAIF se recentre sur ses valeurs et affirme son statut d’ « assureur militant », jusqu’à devenir la première grande entreprise adoptant le statut de société à mission en 2020. Son Directeur Général Pascal Demurger témoigne dans cet ouvrage de ce chemin parcouru.

Puis un homme, Emery Jacquillat, entrepreneur et fondateur de Matelsom, saisit que la CAMIF mourante porte en elle une formidable vision du monde, actuelle et pertinente. Avec ce fragile et précieux brin d’ADN, il relance avec succès l’entreprise pour en faire elle aussi une société à mission.

Cette histoire, dont j’ai été le témoin attentif, est la plus belle leçon de ma vie professionnelle. Elle porte en elle tous les troubles, les doutes et les errements possibles sur le chemin étroit et exigeant de l’entreprise, cette communauté humaine qui se forge sur des valeurs et favorise l’épanouissement de ses parties prenantes. L’ambition de ce manifeste est de nous éclairer sur ce chemin exaltant. 

Vous pouvez commander cet ouvrage sur le site de la FNAC.

Je vous invite à laisser un commentaire sous ce billet. Je ferai un tirage au sort le 10 octobre parmi les commentaires et une personne recevra un exemplaire de ce livre en avant-première.

987ème billet signé Thierry Spencer, créateur du blog Sens du client

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