BNP Paribas transforme l'expérience client et collaborateur
Bertrand de la Chapelle, nouvellement nommé Directeur de la Relation Client et du Marketing– BNP Paribas (au centre de la table sur la photo) présentait les raisons de l'implication de sa banque dans les travaux
"La relation client est un enjeu stratégique, la banque de détail est un métier de relation.
Pourquoi ? Lorsque nous faisons bien notre métier opérationnel dans les prestations quotidiennes (relevés de compte exacts, renouvellement de carte...), tout cela n'est que très normal. C'est lorsque cela ne se produit pas que les choses se gâtent ! Lorsque nous excellons sans intermédiation humaine, c'est juste la base de notre métier.
Le moment de vérité
Tôt ou tard chacun dans sa vie a besoin de rencontrer quelqu'un pour l'aider dans un projet ou l'aider dans une difficulté.Ce moment de la rencontre, c'est le moment de vérité, c'est le moment de relation. C'est le moment ou le client va juger que nous faisons bien notre travail. Il va remettre en cause l'ensemble de la relation si nous ne le faisons pas.
Le premier critère du choix du client est la relation, ce n'est pas le prix, c'est ce qui est émane de la réputation. Et ce bouche-à-oreille traite de la façon avec laquelle on a été servi, la façon dont on a été considéré. Pour se différencier dans la banque, c'est extrêmement difficile, il faut exceller dans la relation. Les travaux de l'INRC ont démarré au moment où nous nous sommes fixés comme ambition d'être la référence bancaire dans la relation client."
Au sujet du projet "Préférence client", Bertrand de la Chapelle développe : "Préférence client veut transformer l'expérience client et collaborateur. L'implication de la direction générale -et en particulier de Marie-Claire Capobianco- a été crucial pour Préférence Client, et ce, afin d’entraîner derrière cette ambition l'ensemble des équipes par des travaux collaboratifs visant à déterminer comment incarner cette ambition.
C'est ainsi que nous choisi des attitudes à adopter pour que cette ambition s'incarne précisément, puis repéré des moments d'attention, qui sont des moments critiques dans lesquels la relation devra être préservée et renforcée. Nous avons en outre cartographié les services rendus, de manière à identifier ce qui est essentiel dans les lieux de rencontre avec le client.
Ces travaux ont permis l'appropriation des équipes à tous les niveaux hiérarchiques, et surtout obtenir des résultats en phase avec la réalité du terrain."
Une ambition de transformation.
"L'enjeu majeur de l'implication des dirigeants c'est de tenir dans la durée car nous avons une ambition de changement, de transformation. Face à une situation difficile, nous avons des réflexes acquis toujours présents. Nos habitudes ne sont pas forcément les bonnes par rapport à cette ambition.
D'où l'exemplarité de la direction générale qui est essentielle. Elle rappelle souvent la priorité du service sur la pro-activité commerciale.
La création de cette direction de la relation client a pour but de soutenir le plus haut niveau de la maison dans la veille permanente et l'engagement jusque dans les détails, pour réaliser cette ambition."
Les collaborateurs et partenaires ne sont-ils pas les premiers clients de l'entreprise ? était ma dernière question à Bertrand de la Chapelle. Il répondait : "C'est certain. Ce que nous demandons aux collaborateurs est surhumain. Nous leur demandons de tenir notre promesse : démontrer au client notre volonté de lui rendre service, faire preuve de considération. S'ils sont les seuls à porter cela, et que quand ils se retournent -car ils ont besoin de support, d'aide- ils sont les seuls à porter la promesse, ça ne peut pas fonctionner. C'est toute l'entreprise, tous les autres collaborateurs, tout le management, qui sont mis sous tension par cette promesse. Il n'y a pas d'autre voie que celle-là : se mettre tous au service de ceux qui sont au service du client. C'est la symétrie des attentions. Ce que nous demandons de faire à ceux qui sont en contact du client, nous nous devons tous de le faire vis-à-vis de ces derniers. On ne peut pas leur dire faites ce que je dis et pas ce que je fais !
C'est pourquoi par exemple, dans notre projet d'amélioration de l'expérience collaborateurs, il y a eu plus de 200 mesures de simplification de procédures internes mises en oeuvre.
Dans la même logique, nous avons demandé à chaque agence de construire un projet de service, mais aussi aux centres de relation client et dans les back-offices.
ENGIE (ex GDF SUEZ) met en oeuvre un véritable management centré client.
Autre témoin, Philippe Robert, Directeur du développement et premium retail – GDF SUEZ (Engie) qui répondait à ma première question sur le sens de sa participation à ce livre blanc : "Notre volonté est d'inscrire l'orientation client sur l'ensemble de nos activités. Notre client est de plus en plus exigeant, soucieux de mieux consommer, en attente de relation personnalisée, notre concurrence nous stimule, tous ces changements nécessitent un ajustement permanent des compétences des collaborateurs du groupe."
GDF SUEZ (depuis baptisée ENGIE) a été récemment récompensée au Podium TNS Sofres Bearing Point en prenant la première place du podium dans la catégorie "Entreprises de service" (lire mon billet à ce sujet). Cette reconnaissance consacre des efforts initiés il y a déjà quelques années, comme en témoignage mon interview datant de 2012 de l'ex-Directeur de la relation client, Eric Lestanguet (et Président de l'INRC). Philippe Robert réagissait à mes propos en précisant que "ce prix est en effet la récompense de l'effort de la Direction Générale en faveur de l'orientation client depuis longtemps. Notre groupe veut clairement être de plus en plus orienté client et rénover, transformer, réinventer l’approche client. Ça passera par une rénovation de l'approche avec les partenaires d'affaires pour construire des offres sur mesure pour ses clients finaux. Ça passera par de nouvelles approches, de nouvelles dynamiques managériales visant à favoriser la proactivité du groupe vis-à-vis de ses clients, la flexibilité et l'efficacité pour une meilleure coordination du travail entre les entités du groupe. Nous voulons mettre en oeuvre un véritable management centré client."
Une nouvelle posture de marque
Dernière question pour Philippe Robert "Quel chemin doit-on parcourir pour accepter une nouvelle posture vis-à-vis du client ? Je fais référence au site "Esprit de service Dolce Vita" qui a adopté la norme (à laquelle j'ai participé, lire mon billet à ce sujet) et qui permet aux clients de s'exprimer librement sur la qualité des services..."
"C'est un travail de longue haleine et cette initiative est la preuve concrète de notre volonté d'installer avec les clients une relation de confiance et de transparence.
Nous voulons co-construire avec les clients, permettre de développer des offres personnalisés. C'est pourquoi nous organisons également des focus groups, nous animons des communautés virtuelles, nous coopérons avec les associations de consommateurs... Nous suivons la satisfaction des clients, nous investissons sur les objets connectés, les nouveaux territoires pour investir ces nouveaux territoires.
SNCF VOYAGES adopte la symétrie des attentions
Antoine de Rocquigny, Directeur des Opérations et du Service aux Clients – SNCF VOYAGES précisait en introduction : "Nous transportons chaque année un milliard de personnes, soit 3 millions par jour, autant d'expériences client. Nous avons à cœur d'être aux petits soins et de répondre aux attentes de chaque client. Nos emplois sont majoritairement industriels (2/3 des emplois), les métiers de service représentent 20% des emplois. Notre activité de service est délivrée en temps réel sous les yeux des clients, c'est une activité physique, une activité de contact, d'où l'importance des démarches compétences. Les attentes des clients évoluent : plus individualisation, plus de digitalisation, plus d'attention.
L'iceberg des métiers
Dans l'introduction du livre blanc, j'ai relevé que la relation client de la SNCF ne concerne pas les 1055 salariés du centre de contact mais à tous les salariés en contact, soit 20.450 personnes. C'est ce que les auteurs du livre blanc qualifient d'"iceberg des métiers". Comment on embarque tous les collaborateurs ?
Antoine de Rocquigny : "Je pense que la partie invisible va bien au delà car la qualité du service concerne l'ensemble des collaborateurs. Pour embarquer les collaborateurs, il faut donner du sens, expliquer où on va. Il faut arriver à donner confiance, susciter l'envie et expliquer pourquoi on fait cette transformation. Nous nous appuyons pour cela sur la culture interne, sur l'ADN du service public, c'est à dire le service du public, le service de chacun. Il faut s'appuyer sur l'encadrement intermédiaire, comme indiqué dans le livre blanc. Si on veut que les agents évoluent dans leurs comportements, dans leurs relations, il faut embarquer l'encadrement intermédiaire et investir managérialement dessus.
La symétrie des attentions, quand les cadres enfilent le gilet rouge...
Pour le dirigeant, cela signifie passer beaucoup de temps avec lui, beaucoup de temps sur le terrain. C'est le principe de Symétrie des attentions, qui n'est pas complètement naturel à la SNCF.
Ensuite, je dirais qu'il faut se mettre à la place du client, et au delà, vivre pour le client.
Pour l'anecdote, lors de la grève de juin dernier, on a demandé aux cadres de vider leurs agendas, et de descendre dans les gares et dans les trains avec leur gilet rouge. Cette mobilisation ne s'était jamais vue à ce niveau là ! Cette expérience a été très révélatrice pour tout le monde, y compris pour le comité de direction. Ce genre d'événement permet de se mettre à la place du client, voir comment il utilise nos outils. Cela a révélé beaucoup de choses aux cadres à ceux "qui font la loi".
Cela permet de traiter les irritants "pour de vrai", tourner l'organisation pour que les cadres se mettent dans l'état d'esprit, dans la posture de faciliter la vie des clients et des agents. C'est notre priorité. On ne peut pas demander au management intermédiaire et aux agents en contact d'être proches du client, d'aider les clients, d'être aimables si derrière c'est l'enfer du fait que l'organisation est compliquée, les process trop lourds, la bureaucratie trop présente, les produits tarifaires incompréhensibles, les outils défaillants."
Un véritable sujet pour le comité de direction
Pour finir, ma question pour clôturer cette table ronde : est-ce que la relation client est un sujet de préoccupation réel des comités de direction ?
La réponse d'Antoine de Rocquigny : "Nous avons coutume de rappeler le théorème de Barbara Dalibard, l'ex Directrice générale : deux points de satisfaction des agents = un point de satisfaction client = 0.5 points de MOP (marge opérationnelle, ou marge d'exploitation). C’est là-dessus que nous avons construit notre démarche. Nous mesurons l'engagement des collaborateurs, la satisfaction des clients et nous regardons les évolutions, les tendances en comité de direction. Cela permet de fixer les priorités dans nos projets d'amélioration de la relation client, dont certains verront le jour bientôt. Je vous confirme que c'est un véritable sujet de notre comité de direction."
Pour télécharger le livre blanc rendez-vous sur le site de l'INRC.
Lisez en outre la première partie de mon compte-rendu de cette soirée INRC.
Billet écrit par Thierry Spencer, auteur du blog Sens du client et Directeur Associé de l'Académie du service.
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