25 mai 2008

Le théâtre (parisien) et le Sens du client

Je ne me souviens pas être allé au théâtre à Paris sans avoir pesté contre les déplorables conditions réservées au public, enfin je veux dire aux clients. Je devrais bien choisir mes mots car généralement il est de bon ton de ne pas critiquer le spectacle vivant et la culture en France, et encore moins d'y adjoindre des notions de marketing.
Cela me démangeait d’écrire sur ce sujet ici, dans mon blog, et illustrer mon propos avec une jolie photo très explicite (prise avec mon téléphone). L’occasion m’est offerte par un article paru dans le journal Le Monde du 17 mai dernier (cf lien plus bas).
Quand je pense au prix que j’ai payé pour être assis dans de telles conditions (sans pouvoir étendre ses jambes), avec une chaleur suffocante, et qui plus est accompagné à mon siège par une ouvreuse blasée et mal aimable. Je suis certain que vous voyez ce que je veux dire car vous avez fatalement vécu cette situation, n’est-ce pas ?
Je n’ose même pas ajouter le fait que vos voisins vont vous gêner soit par leur taille (car il y a peu de théâtres en amphithéâtre à Paris) soit par leurs réflexions (car il y a beaucoup de gens sourds dans les théâtres).
Prenons par exemple au hasard les meilleures ventes ce soir sur un site de vente de billets : le prix du billet pour la première pièce est à 44,50 euros, la deuxième à 56,50 et la troisième à 38,50.
Je sais que j’exagère car je prends pour exemple la catégorie des vieux théâtres parisiens…
Mais ne trouvez-vous pas étonnant qu’il existe un rapport qualité prix si médiocre de si grande notoriété ?
Notons que dans les quarante dernières années à Paris le nombre de salles a été multiplié par deux, atteignant 130 salles avec une moyenne de 300 spectacles par semaine (chiffres issus de l’article du Monde). Cet article relève que l’offre de places augmente mécaniquement avec un volume de 35000, frolant d’après la journaliste « l’implosion ».
A l’heure ou les musées voient leur fréquentation augmenter grâce à des investissements destinés à améliorer la qualité de l’accueil, le « marché » du théâtre parisien ne croit que grâce à un effet de distribution numérique.
Sur 100 français de 15 ans et plus dans les 12 derniers mois, 16 sont allés au théâtre ou au café théâtre (vs 47 pour le cinéma, voir les chiffres dans ce document). Dans notre pays ou l’on oppose Art et Essai et Multiplexes dans le cinéma, grand spectacle et théâtre d’auteur, on parle trop rarement des conditions dans lesquels celui qui paye assiste au spectacle.
Doit-on endurer une salle sans confort pour assister à un spectacle culturel ?
Quand je vois l’âge moyen du public de théâtre (et vous savez qu’il est élevé), je pense aux nouvelles générations qui ne supporteront pas le quart de la moitié de ce que j’ai enduré au théâtre.
Sauf à considérer mieux le public et donc avoir un peu plus le "sens du client", je pense que le théâtre a du souci à se faire.

7 commentaires:

Anonyme a dit…

je ne me sens plus seul au monde à pester contre le manque de place. D'un autre côté, c'est ma faute si je mesure 1m87

Anonyme a dit…

Idem pour moi :
Quand une personne (une vieille en général) soupire car mes 1m91 la gênent, je lui répond méchamment que les places au premier rang sont libres mais qu'elles sont plus chères !

Idem pour les ouvreuses "au black" ! Maintenant, elles refusent la petite monnaie (même quand il y a plusieurs pièces). Elles ne veulent pas 5 euros pour nous placer non ? Et moi de leur répondre : Et le sourire, c'est en sus ?

Merci pour ce coup de gueule !

Anonyme a dit…

Ca me rappelle les débats d'il y a une dizaine d'années lorsque les cinémas multiplexe s'installaient en périphérie des villes. Les gens criaient au loup pour sauver les cinémas des centre-villes.

Ceux-ci diffusent les films dans des conditions (presque) aussi mauvaises que certaines salles de spectacle parisiennes.

Les temps changent, les attentes des clients aussi.

bertrand espitalier a dit…

Chers amis

Je viens de lire avec intérêt votre article et vos réations sur le théâtre et ses conditions…

J’étais dimanche soir à la comédie Française, et ce fut un ravissement, tant par le spectacle que les conditions.

Un excellent rapport qualité / prix !

La pièce, la mégère apprivoisée de Shakespeare dans une mise en scène très très moderne : déconcertante au début, puis finalement passionnante.

Mais vos propos n’étaient pas sur la qualité artistique mais bien sur « le sens du client ».

A ce niveau là, carton plein.

Le prix : 5 € en venant le jour même à 19h30 (il y a un quota quotidien d’une soixante de places à 5 €… parfois en visibilité réduite :-().

Nous avons été placé dans une petite loge (orchestre).

Hôtes et hôtesses impeccables, refusant même les pourboires.

Vestiaire gratuit, avec pourboire également interdit.

Plus de 3h d’un spectacle bluffant, dans de bonnes conditions, pour 5 €, il y a pire !

Je vous le recommande !

Anonyme a dit…

Je suis complètement d'accord sur 2 points
- Il est grand temps de parler marketing dans le domaine du spectacle
- Les sièges dans lesquels nous allons passer 2 heures assis doivent être confortables

Le marketing est bien plus qu'une histoire d'affiches et de placement media. C'est une histoire de comment est-ce que l'on peut dépasser les attentes des clients. Cela va de la facilité à se procurer les billets, du site web, de l'accueil.

La France va vivre des coupures majeures de subventions dans le domaine dans un futur très proche et les directeurs de structures doivent se préparer à ce changement.

On peut dire bien du mal de l'Amérique du Nord mais ils gagneraient à voir ce qu'il se fait ici.

Ils ne doivent pas oublier une phrase de Seth Godin
Too little time
Too many choices

Que vont'ils faire pour garder le public dans les salles ? L'ère des billets à 15 euros (dans les salles publiques) s'acheve

Anonyme a dit…

Le sens du client, le sens du spectacle, le sens de l'échange. La qualité de la pièce, du film, des comédiens, des acteurs ne suffit effectivement pas à faire venir des spectateurs. Les conditions dans lesquelles sont délivrées l'échange en assurent la réussite.
Cette alchimie est difficile mais lorsque qu'il manque un ingrédient la recette tombe à plat !

Laurence Vernier-Palliez - Clienteam a dit…

Confort d'internet et inconfort des sièges :
Alors que la possibilité de réserver en ligne a représenté un saut quantique dans la qualité de service au client (en amont)...et accessoirement une fréquentation accrue des théâtres et une hausse de leurs recettes, ils sont encore nombreux à offrir un
inconfort de siège qui ne se limite hélas pas aux strapontins.Tel le Palais Garnier, où j'ai souffert samedi dernier malgré la beauté éblouissante des ballets de Roland Petit.
Choisir délibérément de ne satisfaire que les clients en dessous de 180 cm, c'est certes une forme de sélectivité originale, mais, à coût (:-)) sûr, une stratégie suicidaire, considérant la génération corn flakes, qui devient progressivement leur cœur de cible.
Cela ressemble également étrangement aux mauvaises pratiques d'un bon nombre d'entreprises de service qui soignent le client jusqu'à sa décision d'achat et le maltraite par la suite...