Troisième livre de ma sélection d'été 2022 : un essai sur l'évolution de nos comportements par le brillant président d'Arte, Bruno Patino. Cet ouvrage poursuit la réflexion sur notre condition numérique entamée avec "La civilisation du poisson rouge" qui abordait avec talent l'économie de l'attention. Un livre utile qui nourrira vos réflexions sur les médias sociaux, leur gestion et la construction de l'opinion.
Bruno Patino est un journaliste ayant travaillé pour Canal+, Télérama, Les cahiers du cinéma, avant de prendre la direction de France Culture puis celle de l'École de journalisme de Sciences-Po. Il a fait l'expérience de nombreux médias jusqu'à rejoindre la télévision comme responsable du numérique à France Télévisions, avant d'être nommé à la présidence d'Arte. Il est l'auteur ou le co-auteur de plusieurs ouvrages tels que Le devenir numérique de l'édition, Télévisions (essai français) et La condition numérique (essai français).
"Tempête dans le bocal" est la suite de l'essai ayant rencontré un grand succès, intitulé "La civilisation du poisson rouge, petit traité du marché de l'attention." Plutôt qu'une suite, on devrait parler de poursuite d'une réflexion sur notre condition numérique. Ce livre, écrit dans un langage facile et accessible vous permettra de prendre un recul nécessaire sur l'évolution de nos comportements numériques. Très bien documenté, il permet de saisir les enjeux des mouvements d'opinion et les conséquences qu'ont les média sociaux sur notre vie quotidienne.
Comme pour mieux prolonger le propos de son premier ouvrage, il nous prévient : "(...) la conquête de notre temps en durée et en intensité n'est pas achevée. L'accélération reste le principe d'organisation du nouveau capitalisme numérique. Le temps devient à la fois la ressource et l'objet de nombreuses transactions. Sa valeur augmente, mais son rendement diminue à mesure qu'il est occupé. Nos vies s'émiettent."L'auteur évoque le plus récent épisode mondial de pandémie ayant conduit à une forme de fatigue. "La société hyperconnectée est une société de fatigue : fatigue décisionnelle face aux sollicitations permanentes, fatigue de ne pas maîtriser son temps, fatigue psychologique face à la surcharge émotionnelle permanente. La période du virus y a ajouté la "zoom fatigue" (...). A l'origine de ce nouveau symptôme, l'imperfection de l'application à gérer la complexité d'une relation et la dimension non verbale de notre communication." nous dit l'auteur.
Bruno Patino qui se passionne pour l'évolution de Facebook et de son créateur -dépeint dans le livre comme un effrayant démiurge-, évoque une forme de démocratie qu'il nomme "émocratie", "un régime qui rend performatives nos émotions et les font envahir l'espace public", précise-t-il. Pour lui, le règne de l'émotion n'est pas nouveau et "Ce qui change, c'est sa domination, qui est un produit algorithmique".
Je vous recommande la lecture de ce livre enrichissant, synthèse utile de ces dernières années et ouverture sur le futur. Bruno Patino porte un regard avisé sur les grands événements, rapporte de nombreuses anecdotes et faits divers significatifs, en prenant soin de remettre en perspective avec des études ou d'éclairantes citations. Vous l'aurez compris, ce livre n'est pas directement lié à l'expérience client mais le regard porté sur notre société par Bruno Patino est si aigu et son livre si documenté qu'il vous enrichira et vous aidera à prendre un recul sur la folle évolution de notre monde. L'auteur ne manque toutefois pas d'optimisme et prétend que "changer ce monde devenu fou est possible !" Son ouvrage s'achève sur une note positive, poétique et très personnelle que je vous laisse découvrir si vous lisez ce livre.
Il vous faudra moins de 3 heures pour lire cet essai de 186 pages, soit un aller en train entre Paris et Avignon. Pour commander tout de suite Tempête dans le bocal, rendez-vous ici.
1026ème billet signé Thierry Spencer, conférencier, créateur du blog Sens du client, co-fondateur de KPAM Next et acteur de l'économie de l'attention (j'ai ajouté ça pour vous qui êtes allé au bout de ce billet).
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