18 février 2017

Le client sera équilibre (Tendances relation client 2017 - 10/10)

Cet équilibre, auquel fait référence cette dixième et dernière tendance, est celui qui existe entre la qualité de la relation client et celle du management. C'est ce que l'Académie du service appelle la Symétrie des attentions : prendre soin de ses collaborateurs pour qu'ils prennent soin des clients, un concept qui n'est pas nouveau mais qui tend à faire des émules.

Chaque année cette tendance à la recherche d'un meilleur équilibre de traitement entre clients et collaborateurs est plus forte et cela tient à plusieurs raisons :

Un besoin accru de reconnaissance
Dans une étude inédite sur la reconnaissance au travail en novembre 2016, FIDAL, l’Anact et Amplitude montraient qu'un très fort besoin de reconnaissance est exprimé par les collaborateurs des entreprises et "reconnu comme insuffisamment mis en œuvre", pour citer les auteurs.
L'étude nous apprend que 54% des répondants estiment que la politique de reconnaissance menée au sein de leur entreprise n’est pas satisfaisante. A l’inverse, seuls 9% considèrent que leur entreprise "fait ce qu’il faut", autant dire que le tableau brossé ici est plutôt dramatique.
Ce qui a attiré mon attention dans cette étude est le fait que parmi les sources de reconnaissance figure le client lui-même, à égalité avec le manager (à hauteur de 68%), juste derrière "les collègues du service" (72%) et loin devant "la direction" (50%).
Le résultat tend à prouver que le client agit directement sur l'engagement des collaborateurs et que le management est insuffisamment sensibilité aux enjeux de la reconnaissance.

Un lien prouvé entre engagement des collaborateurs et expérience client
Temkin Group a réalisé en 2016 l'étude "Employee Engagement Benchmark Study" dans laquelle on apprend que les entreprises leaders dans le domaine de l’expérience client ont 1,5 fois plus d’employés engagés que les entreprises en bas de classement, un nouveau chiffre intéressant pour convaincre les plus sceptiques du bienfait de l'équilibre.
Dès lors, je ne cesse pour ma part de déplorer, année après année, les résultats de l'excellent Baromètre Social de la Relation Client 2016 réalisé par Randstad : sur une note maximale de 10, il y a 1,2 points d'écart entre la satisfaction des employés des centres d'appels internes et celle des centre d'appels externes.
Les employés des prestataires mettent une note de 5,5 sur 10 et les employés de l'entreprise elle même "donneuse d'ordre" mettent 6,7. Si je comprends bien, on accepte que certains collaborateurs au service des mêmes clients soient moins satisfaits que d'autres. Ce chiffre ne cesse de me révolter car il traduit le fait qu'il y a un écart entre les discours des dirigeants -et en particulier les directeurs de la relation client- et leurs actes. Ils affichent leur accord avec les principes de la Symétrie des attentions, mais lorsqu'il s'agit de rédiger un cahier des charges pour la prestation d'un centre de contact, les vieux KPI et les démons de la rentabilisation remontent à la surface. On parle d'enchantement alors qu'on impose aux collaborateurs des scripts et une durée moyenne de traitement (la fameuse DMT dont le terme "traitement" en dit long sur le chemin à parcourir pour passer d'un appel à une conversation). On ne s'étonnera pas, qu'à force de traiter les collaborateurs comme des robots, ils ne soient remplacés par eux (voir mon billet "le client sera Chatboté").

Les marques tendent à devenir des entreprises
La réputation d'une marque est faite par ses clients et par ses collaborateurs, les clients sont de plus en plus sensibles à la façon avec laquelle sont traités les collaborateurs : rares sont les dirigeants d'entreprise qui prennent conscience de cette tendance de fond.
Je peux en citer au moins un qui a fait ce chemin, notamment lors de sa décision de diffuser un film -destiné à l'origine aux candidats de l'entreprise- comme spot de publicité. Vous avez peut-être vu le film "la quête du geste parfait" de Nespresso en France ; il montre toutes les parties prenantes dans la réalisation du produit et du service, du fermier en Amérique du sud au spécialiste café en boutique, de l'ingénieur au téléconseiller, du "nez" à l'informaticien.
Arnaud Deschamps, le Président de Nespresso France, développe cette forte conviction dans le livre dont je suis le co-auteur "Le management de la relation client", sorti il y a quelques semaines, ou il déclare (tout comme dans une interview donnée à la Tribune) "l'avenir de ma marque, c'est mon entreprise".
C'est une conviction en droite ligne avec celle des créateurs du site Glassdoor (la "porte vitrée", synonyme de transparence) qui va bientôt fêter ses dix ans. Les collaborateurs y évaluent leur entreprise et leurs avis sont publiés. 640,000 employeurs dans 190 pays peuvent y trouver ce que pensent leurs collaborateurs actuels ou passés. Dans son édition française, Glassdoor révélait son classement 2017, et devinez quoi ? On trouve dans le trio de tête Microsoft, Leroy Merlin et Decathlon, des entreprises dont les initiatives locales ou nationales traduisent cette volonté d'assurer un équilibre entre la qualité de la relation client et celle du management. Lisez le cas du magasin Leroy Merlin pilote de la Symétrie des attentions ou bien le site de recrutement de Decathlon pour vous en convaincre.

C'est par cette tendance que s'achèvent les 10 tendances 2017, car, au delà de toutes les évolutions de la technologie et des comportements du client décrites dans les précédentes tendances, il me semble capital d'insister sur les révolutions managériales à venir dans certaines entreprises en France et dans le monde. La force d'une marque, d'un produit ou d'un service n'est rien sans l'équilibre de l'entreprise et l'expérience du client tend à s'équilibrer avec celle des collaborateurs.

Un billet de la catégorie tendances écrit par Thierry Spencer, auteur du blog Sens du client, Directeur Associé de l'Académie du service, qui se bat pour maintenir l'équilibre et la symétrie tous les jours.

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