En l’espace de quinze jours, j’ai eu deux expériences en tant que client qui m’ont particulièrement irrité. Et si j’en crois le contenu abondant sur cette question sur Internet, je ne suis pas le seul.
Au Franprix à côté de chez moi, au moment de règler une course de dépannage, je présente ma carte bancaire et la caissière me dit « quinze euros minimum, c’est écrit là » (en me montrant l’autocollant en photo de ce billet). Loin de moi l’idée à ce moment de lui dire à quel point ce minimum est absurde et qu’il ruine ce commerce par son manque de sens du client. A quoi bon accabler cette employée ? Franprix est une enseigne de distribution de proximité qui promet par sa signature « à deux pas, tout est là », une certaine idée du service rendu aux clients qui n’est pas relayée par cette disposition. Ce minimum de carte bancaire est un vrai irritant, d’autant que Franprix n’est pas un petit commerçant indépendant.
Je demande donc simplement à la caissière si les clients se plaignent de ça. « Si vous saviez ce que j’entends ! » me dit-elle… Y a t’il quelqu’un qui écoute chez Franprix ?

Chez mon buraliste, je me trouve dans la même situation ; et là, ayant affaire au patron, je lui demande pourquoi son minimum de paiement par carte bancaire est à 40 euros (photo ci-contre). A ce moment, je réalise qu’il y a deux sortes de professionnels en France qui s’illustrent souvent par leur franc-parler et leur sens du client variable : les buralistes et les chauffeurs de taxi. J’ai le droit à une leçon sur le thème « je ne travaille pas pour les banques » et autres « moi j’suis pas aux 35 heures » ou « si vous voulez acheter vos cigarettes ailleurs, ne vous gênez pas » (je cite). Pourquoi tant de haine ? Pourquoi je n’arrête pas de fumer ?

Mettons nous à la place de ce commerçant acariâtre.
Le sujet de la carte bancaire est un irritant fréquent entre clients et commerçants, et chaque partie ne fait que s’énerver de façon stérile.
Certaines enseignes, comme Monoprix, acceptent les paiements à partir de 1 euro. Mon boulanger accepte la carte à partir de 7 euros. Mon pharmacien n’a pas de minimum. D’autres, comme Lidl, ont fixé la barre à 10 euros (et s’en vantent). Comme le précise la Loi, les professionnels sont libres de fixer le minimum.
Mais, soucieux de faire prospérer leur petite entreprise, et quitte à se mettre à dos leurs clients, ils mettent un montant minimum, au prétexte que ça leur coûte cher.
Ça leur coûte combien au juste ?
La vérité est qu’ils ne savent pas trop, et que les banques, soucieuses de faire prospérer leur grande entreprise, quitte à se mettre à dos…heu… personne, font preuve d’une certaine opacité sur les 5 milliards de frais estimés (encaissés à chaque fois par la banque du client et la banque du commerçant).
C’est ce que pensent trois députés qui se sont intéressés au moyen de paiement favori des français (40% des transactions, 60 millions de cartes en circulation) et ont fait plusieurs propositions dans un rapport parlementaire sur le sujet (missionnés par Christine Lagarde) :

  • Renforcement de la transparence des commissions payées par les commerçants grâce à un relevé détaillé pour comparer l’offre entre banques (car les commerçants ne savent ni le nombre de transactions concernées, ni la ventilation fixe / variable).
  • Réduction des coûts associés aux frais de télécommunication des transactions par cartes avec une alternative sur Internet.
  • Baisse d’au moins 30% des frais payés par les commerçants qui réaliseront jusqu’à 12.000 euros d’encaissements annuels par carte.
  • Mise en place d’une offre tarifaire très attractive pour les achats de moins de 15 euros. 
  • Promotion de l’utilisation du paiement sans contact avec des aides attribuées lors du renouvellement d’un terminal au « sans contact ».
Cet irritant semble en bonne voie de se réduire si les banques acceptent (ou sont obligées) de facturer à un coût raisonnable la transaction dématérialisée et de jouer la transparence, et si les commerçants ne se cachent pas derrière ces excuses pour ne pas rendre ce service au client. Le paiement dématérialisé (avec le portable) va se développer et les clients ne comprendront pas pourquoi ils paieraient leur stationnement de parking souterrain, leur péage en voiture sans montant minimum et pas leur douzaine d’oeufs.
Billet de la catégorie « irritant » écrit par Thierry Spencer du Sens du client, le blog des professionnels de la relation client et du marketing client.
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