Moi qui pensait naïvement que le temps du marketing de masse était révolu, que les marketers et leurs prestataires scoraient, segmentaient, ciblaient et respectaient leurs prospects et leurs clients. Que nenni ! Certains annonceurs se contentent, comme ce pêcheur en illustration du billet, d’utiliser des bâtons de dynamite pour aller chercher du poisson.
Quelques exemples irritants
Prenons, comme je m’y autorise dans cette rubrique, mon cas personnel.
Je reçois depuis de nombreux mois des emails de la société « L’Officiel des vacances ». Je me suis désabonné une fois, deux fois, trois fois. J’ai même rempli le formulaire de la CNIL contre le spam.
Et devinez quoi ?
Rien, nada, nothing, nichts, que couic !
J’observe également les emails de la société MaxiPromos dont les objets manient la nitroglycérine.
Exemples irritants : « Nous avons retrouvé votre colis ! » ou « Bravo vous avez gagné ! ».
MaxiPromos, à la manière des vépécistes peu scrupuleux des années 70 utilise l’arme fatale du Sweepstake (la loterie à pré-tirage qui permet d’annoncer au prospect « vous avez peut-être gagné, pour le savoir cliquer ici ». L’Huissier désigne avant l’envoi un numéro gagnant et chaque destinataire possédant un numéro doit se manifester pour espérer son gain potentiel).
L’Express, tout comme Grazia, deux titres de presse, utilisent aussi cette technique et n’hésitent pas à se fendre d’un joli « félicitations Thierry » dans l’objet de leur email.
Bref, comme les écologistes vous le diront, la pêche à la dynamite fait remonter à la surface beaucoup de poissons, en rend sourds quelques-uns, en tue énormément -y compris ceux que vous ne consommez pas-, ruine les fonds sous-marins et les coraux puis amenuise l’espoir de voir se reproduire de nouveaux poissons.
Emailing de masse, marketers à la masse
Si la publicité de masse a toujours eu une part d’inefficacité intrinsèque (David Ogilvy disait « quand je fais de la publicité je jette la moitié de mon argent par les fenêtres, mais je ne sais pas laquelle »), le marketing direct a toujours eu, quant à lui, des côtés obscurs. Pour maximiser les rendements, on pousse les promotions ravageuses et les jeux aux promesses illusoires. Nous avons connu cela avec le mailing, aucune raison qu’on n’y ait pas droit avec l’emailing (et bientôt avec les réseaux sociaux).
Et pourtant, alors que les outils de ciblage sont à un niveau jamais égalé, que les coûts de stockage des données sont au plus bas, on continue à faire de la pêche à l’aveugle.
De la même manière, les emailings dont l’expéditeur est « noreply » (nepasrépondre) semblent absurdes alors que tous les professionnels du marketing s’accordent sur le dialogue nécessaire avec le client.
Mais la masse l’emporte, et comme le souligne la semaine dernière Fidelead : « la progression de l’emailing se confirme en France ». Le volume d’emails routés a en effet augmenté de 44% en 2010 au global et de 32% par adresse email (chiffres SNCD).
Face à ces pratiques redoutables qui sont le fait d’une minorité assez peu silencieuse, on ne s’étonnera pas de voir les rendements chuter et les clients devenir méfiants (j’avais écrit « sensible » ou « filtre » sur mon billet de tendances de début d’année) et perdre le plus grand capital qu’ils aient à offrir : leur confiance.
Quand je pense qu’entre le livre de Seth Godin « Permission marketing » et le Baromètre de l’intrusion (signé ETO et Market Audit) dans son édition de la semaine dernière (lire les résultats et l’analyse de Christophe Benavent), il s’est écoulé 10 ans… Certains marketers n’auraient-ils rien retenu ?

Billet écrit par Thierry Spencer du Sens du client, le blog des professionnels du marketing client et de la relation client.

Marketing client – Sens du client – CRM – Relation client – Culture client – Expérience client