Dans ma rubrique Irritant aujourd'hui, un produit au joli nom : "Jour de marché de CROCODOR". Je ne sais pas ce qui m'a pris d'acheter ça pour le bac à légumes du frigo ; une envie de propre, un beau packaging, un nom amusant, l'achat d'une bonne conscience, le goût de l'aventure dans les gondoles, une pulsion d'achat au rayon droguerie de mon Monoprix...
Au moment de défaire le produit de son emballage, je lis les mentions légales sur le côté et je crois devenir fou. Non pas que le produit soit mensonger ou insatisfaisant, là n'est pas la question. En fait, je n'avais pas le souvenir d'avoir jamais lu ça de ma vie de consommateur.
Les mentions qui figurent sur la boîte indiquent que la formule est utilisée par des gens biens : les "professionnels de l'agriculture biologique", .
Mais juste en dessous je lis que le produit est classé "dangereux pour l'environnement", qu'il est "toxique pour les organismes aquatiques" et que je dois "éliminer le produit et son récipient en les portant à ma déchetterie locale". Je ne sais même pas où se trouve ma déchetterie locale (en fait, j'ai cherché : elle est à 7 kilomètres de chez moi) et j'ai oublié de dire aux trois membres de ma famille qu'il fallait aller y apporter Crocodor Jour de marché après utilisation et ne pas le jeter à la poubelle. Maintenant je me sens mal pour les poissons.
Comment a-t'on pu créer un tel produit ?
Sa promesse : "Bénéficiez d'une innovation technologique et profitez des vitamines et saveurs de vos fruits et légumes plus longtemps, comme au premier jour de marché."
Pour les clients qui ont lu les mentions légales comme moi, il y a de quoi devenir fou :
- Incompréhension totale : un produit qui "préserve vitamines et saveurs" des produits frais que j'achète, se révèle dangereux pour l'environnement.
- Cruelle révélation : un produit utilisé "par les professionnels de l'agriculture biologique" devrait être un bon produit, non ? C'est donc toute l'agriculture biologique qui en prend un sale coup (alors que la majorité des français en a une bonne opinion selon le 7ème Baromètre Consommation et perception des produits biologiques paru hier).
- Atroce sentiment de culpabilité : si je veux "une qualité de conservation professionnelle", je dois aller à ma déchetterie pour m'en débarrasser après utilisation, ce qui est pour la majorité des clients peu probable. C'est écrit trop petit d'une part pour qu'on le voit, et c'est matériellement fort peu probable de s'y rendre d'autre part.
Les clients sont déjà perdus dans les logos bio (lire l'article de LSA), et alors que l'année 2010 promet un client Eco-sensible (comme je le prétendais dans mon billet sur les tendances 2010), les pistes sont de plus en plus brouillées et complexes. Un tel produit ne fait que rendre le client au mieux perplexe et au pire fou comme moi. On ne s'étonnera pas de voir le discours des défenseurs de l'environnement se radicaliser face à de telles innovations produit.
Laissons à l'excellent New Yorker le soin de conclure avec le dessin humoristique ci-dessous.
Billet écrit par Thierry Spencer du Sens du client, le blog des professionnels du marketing client (responsables et écolo).
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