On connaissait l‘expression « Wahou » pour désigner l’effet produit sur un client enchanté, la délicieuse surprise provoquée par un service hors norme, une petite attention qui fait la différence. Zappos, entreprise américaine qui se distingue par son excellence, en a même fait une des 10 façons de faire adopter le service au client dans une société.
On trouve désormais le contraire de cette expression dans le pays du soleil levant.
« Nââândé !? » est, selon l’auteur du livre en illustration de ce billet,...
«un petit mot qui exprime toute la stupéfaction japonaise face à notre façon d’être bien française», un étonnement que j'avais décrit dans un de mes billets Irritants "bienvenue en France".
Je m’intéresse aux exemples de standards de la relation client du monde entier depuis toujours, à tel point que j’ai créé avec Cécile Delettré le Tour du monde de la relation client, dont la première édition a eue lieu au mois d’octobre dernier (lire mon billet à ce sujet).
J’ai donc lu "Les tribulations d'une japonaise à Paris", petit livre très amusant, et j’ai pensé qu’il avait toute sa place dans ma rubrique Irritant.
Eriko Nakamura est une journaliste japonaise qui vit à Paris depuis dix ans. Elle a consigné dans ce livre toutes ses sources d’étonnement, tous ses « Nââândé », dans sa vie personnelle comme ses expériences de clientes.
Les japonais souffrent à Paris. Vous savez certainement que certains touristes japonais tombent malades suite au choc qu’ils subissent du fait du décalage entre le Paris de carte postale et la dure réalité. Le Professeur Hiroaki Ota est médecin aux urgences psychiatriques de l’hôpital Sainte-Anne ; il décrit cette maladie comme le « syndrome de Paris ».
Dans le métro
Si on déplore à Tokyo les mains baladeuses (résolu par la création de wagons réservées aux femmes), on loue dans le "chikatetsu" (métro local) la propreté extrême, la discipline des voyageurs et des employés. A Yokohama, une "brigade des bonnes manières" composée de personnes du 3ème âge a été mise en place pour rappeler aux passagers de ranger leur téléphone portable et baisser le son de leur baladeur.
Au supermarché
La caissière apathique qui mâche son chewing gum, et discute avec sa voisine de ses problèmes personnels, n'a pas échappé à l'auteur de ce livre. Au japon, le personnel porte des gants, ceux qui touchent les produits ne touchent pas l'argent. En France, faire la queue dans un commerce est une improvisation habituelle, alors qu'au Japon le commerçant fixe les règles et tout le monde s'y conforme.
Dans les grands magasins
Les "Depato" japonais (nom japonais qui vient de department store) sont connus pour leur service exceptionnel. Accueillis par le sourire et le "Irashaimassé" (soyez le bienvenu), vous n'échapperez pas au "greeter" en charge de donner le ton de votre expérience à venir (un concept pris comme exemple dans le livre de benoît Meyronin "Manager l'innovation par le service"" dont je viens de faire la chronique.).
Eriko Nakamura ne comprend pas comment dans la capitale de la mode, après l'ouverture, les vendeuses sont en train de se maquiller, discuter entre elles ou faire le ménage sur leur stand. Elle remarque aussi que les caisses ne sont pas encore ouvertes quelques minutes après l'ouverture.
Elle aussi, comme certains d'entre vous et comme moi, ont eu droit à cette fameuse réplique : "Tout est là !", en réponse à une demande de taille ou de coloris qui n'est pas dans le rayon.
Son expérience de la fermeture ne vaut pas mieux. Les vendeuses fatiguées vous font sentir que le rideau va se baisser et qu'elles ne sont pas là pour vous aider à faire un achat tardif.
Elle raconte l'expérience de son mari qui achète un CD endommagé au Japon. Il le rapporte, on lui échange sans discuter et on lui demande sa carte de visite professionnelle. Deux heures plus tard, le directeur du magasin se présente à son bureau en personne pour lui présenter ses excuses et lui offrir un autre album du même artiste.
Au restaurant
Les japonais trouvent inconcevable qu'on présente l'addition alors que vous n'avez pas fini de manger ou boire. La semaine dernière j'ai eu le droit au fameux "je dois vous encaisser car on change de service", alors que j'avais à peine trempé mes lèvres dans mon Perrier au restaurant du Grand Palais à Paris. De la même manière aux Etats-Unis, manger et payer l'addition sont deux moments séparés.
Vous trouverez dans ce livre de loufoques et tragiques anecdotes de serveurs de café parisien aux manières "cavalières", pour reprendre l'expression choisie par l'auteur.
Néanmoins, j'ai appris qu'au Japon, il n'était pas rare de faire payer plus cher les clients qui ne sont pas habitués. Autres lieux, autres mœurs...
Dans le taxi
On ne peut pas faire un blog sur la relation client sans évoquer notre honte nationale, l'étendard de la médiocrité du service à la française : les taxis parisiens (lire mon précédent billet à ce sujet).
Les japonais s'attendent à retrouver dans notre capitale les standards nippons : chauffeurs aux gants blancs, voitures immaculées, courtoisie et sens du service des taxis japonais qui vous accompagneront -selon elle- sur quelques centaines de mètres sans rechigner.
Je vous laisse découvrir les autres exemples et anecdotes amusantes du livre. Si le portrait du français est cruel, la description de certaines mœurs japonaises à de quoi effrayer nous autres hexagonaux ; l'auteur du livre fait preuve d'un certain talent et d'une honnêteté intellectuelle remarquable. L'herbe n'est pas si verte ailleurs !
Ce que je retiens de la lecture de ce livre distrayant, qu'on ne range habituellement pas dans les rayons "relation client", c'est que la meilleure source d'amélioration est l'étonnement. Il faut avoir le courage de se regarder avec des yeux neufs et observer les standards de comportement de service dans une nouvelle perspective. Vous avez remarqué à quel point on est sensible au service et aux attentions lorsqu'on est en vacances à l'étranger, comme baignés dans un autre monde et tout à coup attentifs ?
Essayons de surfer sur nos propres sites, visiter nos propres magasins, échanger au téléphone comme si nous étions dans un pays étranger. Faisons cet effort pour nous améliorer et faire la différence !
J'offre un exemplaire de ce livre à deux lecteurs qui laisseront un commentaire à la suite de ce billet avant le 12 mai prochain à minuit. Pour ceux qui veulent le commander tout de suite, je les invite à suivre ce lien.
14 commentaires:
Cet ouvrage a l'air intéressant. Outre ces exemples de la vie courante ou le niveau de service n'est pas toujours jojo, j'ai l'impression, pour habiter un coin touristique autre que Paris, que de toutes façons, notre accueil des touristes laisse à désirer. C'est désolant.
Par contre, attention, le lien pour commander ne marche pas.
J'aime bien le "syndrome de Paris". Y'a t'il un Syndrome de Tokyo ? En tout cas il y a bien un Japon d'estampes, postales ou non ;-)
J'approuve à 100%, s'en est même déprimant quand on revient du Japon. Bien au delà des touristes, le client est rarement le roi, trop peu respecté, parfois même il semble déranger le vendeur. C'est un problème de fond, un problème de culture
Même sans être partie à l'autre bout du monde et n'étant pas une touriste à Paris, il y a pleins d'exemples qui me font sourciller à sortir de mes gonds ... Je suis curieuse de voir si il est dans la même ligné que les God save ...(et les déclinaisons de la France)
C'est dingue cette maladie ? Et ça touche BCP de japonais ? Bravo pour la découverte de ce livre.
Parisienne "pur jus", au Dieu, combien de fois je m'exclame que nos touristes doivent subir un véritable "désenchantement" lorsqu'ils commencent à découvrir certains visages de notre capitale !
J'adhère à cette idée d'étonnement que vous soulignez dans votre post ; finalement, il s'agit un peu de retourner quelques années en arrière et de retrouver ses yeux d'enfants et la bienveillance qui les accompagne, pour découvrir de nouvelles idées, parfois simples, mais pourtant non exploitées, qui font du client le centre des attentions de l'entreprise. Une autre façon d'aborder ce sens du client que j'essaye d'exercer au quotidien dans mon métier de service est l'empathie, sentiment malheureusement bien peu développé, mais qui s'il l'était un peu plus, éviterait bien des expériences désastreuses souvent vécues...
Bonjour
Pour avoir eu le déplaisir de constater ces incorrections envers les clients dans notre chère capitale, je ne peux que souscrire à ces avis.
Il reste néanmoins nombre de régions, villes et villages en France ou l’accueil du touriste reste une priorité : je reviens d’un court séjour dans le Cantal, région régulièrement moquée pour son prétendu coté « arriéré », ou j’ai été accueilli, en tout lieu, avec le sourire, l’amabilité et le sens du client que l’on est en droit d’attendre d’un pays ou l’industrie du tourisme se veut aussi importante. Des paysages magnifiques et préservés, des villes propres et accueillantes, une volonté de partager, bref, l’opposé de l’image écornée de notre capitale. J’ai fait le même constat amer en comparant « l’accueil » touristique du Var (tout un poème !!!) et la bienveillance du sud-ouest à l’égard des visiteurs. Bref, il faut parfois sortir des évidences pour retrouver le plaisir de voyager dans notre pays…
Bonjour,
Merci pour cet article. Vivant à Paris depuis peu de temps et débarquant de province, il est parfois choquant de voir les comportements des gens à Paris, notamment vis-à-vis des étrangers perdus dans le Métro! Mais je suis curieuse de connaitre le point de vue des Japonais à ce sujet et d'en savoir plus sur leurs propres coutumes.
Livre drôle et instructif pour nous Français ! et Eriko est une Japonaise incroyable, pleine d'humour qui connait bien la France puisqu'elle y vit depuis 10 ans.
Si vous avez aimé Naaandé, je vous conseille PARIS TOKYO sur iPad, un livre que je viens de sortir aux éditions merveilleuses, un portrait croisé d'une Française qui découvre Tokyo et une Japonaise qui découvre Paris
en images, avec de l'interactivité et avec des bruits des villes
https://itunes.apple.com/fr/app/paris-tokyo/id616262263?l=fr&ls=1&mt=8
à bientôt
Nadège Fougeras
Bonjour Thierry, et merci pour ce nouvel article très attrayant qui donne envie de lire ce livre pendant ce week-end prolongé qui s'annonce en france !
Cordialement
Céline Ansquer
A Paris comme ailleurs, on oublie souvent que l'humain est source de création de valeur pour l'entreprise, qu'il s'agisse de ses clients ou de ses agents...j'aime beaucoup cet article, et cette jolie conclusion qui nous amène à nous interroger de façon contructive.
Quant à Benoît MEYRONIN...un grand homme du Service avec un grand S, qui a écrit nombre d'ouvrages, tous plus intéressants les uns que les autres.
Fort heureusement pour notre pays, j'ai le sentiment que cette sale habitude de snober ou toiser le client (a fortiori le touriste) reste cantonnée à Paris. Dans d'autres villes (mêmes grandes) le ressenti est plus positif avec un vrai accueil.
Par contre, pour bien mesurer l'accueil parisien (et sans encore avoir lu le libre), digne de la publicité du journal éponyme il y a quelques temps, au choix:
- aller "manger" dans un restau à St Michel
- l'expérience taxi est pas mal (je conseille d'un aéroport)
- retirer un colis à la poste
- demander à échanger de la monnaie dans un café
- hélas, etc. etc. etc.
Arnaud
Merci à tous pour votre participation. C'est Aurore L. et Thibaut Arrot qui gagnent un exemplaire de ce livre. Je les invite à m'envoyer un mail à contact(at)sensduclient(point)com pour me donner leur adresse postale.
Bonjour, J'ai commencé une formation de conseillère en relation commerciale à distance. Plus j'avance dans la découverte de cette profession plus je me passionne pour celle-ci. Une de nos formatrice nous a conseillé votre blog et j'ai lu ce billet avec plaisir.
Je suis 100% Française mais mon histoire familiale et mon parcours personnel m'ont toujours donné le sentiment d'être étrangère dans mon propre pays. Quel bonheur de trouver un domaine professionnel dans lequel mon "étrangeté" pourra s'exprimer.
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